Protégeons les minorités

Le projet de loi portant Code général des collectivités territoriales décentralisées que vient d’adopter l’Assemblée nationale suscite au sein de l’opinion une surprenante effervescence. D’aucuns, en effet, suspectent à tort le texte de consacrer une régression par rapport aux acquis réels, mais encore fragiles de l’unité et de l’intégration nationales si chères au coeur des Camerounais. Dans ce débat nourri, les dispositions relatives à une prise en compte et au respect de certaines spécificités socio culturelles lors du choix des élus locaux cristallisent les critiques les plus vives.

On se rappelle que les échanges lors du Grand dialogue national tenu fin septembre - début octobre derniers avaient laissé apparaître que les violences qui ont cours depuis trois ans dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest sont pour une bonne part imputables aux lenteurs de la mise en oeuvre de la décentralisation telle que prescrite par la Constitution du 18 janvier 1996. Aussi, les participants avaient – ils plaidé en faveur d’une accélération du processus pour aller vers une plus grande autonomie des collectivités locales.

D’où le texte soumis récemment à l’examen du parlement dans le cadre d’une session extraordinaire. Le projet de loi propose conséquemment un statut spécial pour les régions du Nord-Ouest et du Sud- Ouest, conformément aux recommandations du Grand dialogue national, en puisant également dans les dispositions pertinentes de la loi fondamentale. Tout en traitant de l’organisation et du fonctionnement des huit autres régions. Il est admis et reconnu que le triangle national constitue une véritable « Afrique en miniature ». En raison d’une diversité ethnique, linguistique et religieuse exceptionnelle. Vouloir ignorer cette réalité complexe dès lors qu’il s’agit de juxtaposer, mieux de fédérer autant de composantes, autant d’identités remarquables relève d’une démarche aussi inappropriée que dangereuse. Dans le contexte actuel, il est plus que réaliste que le maire de la ville de…, moteur de l’exécutif local, soit « une personnalité autochtone de la région de rattachement de la communauté urbaine ». C’est du reste ce qui prévaut depuis toujours sans grand dommage.

Il est donc étonnant que d’aucuns, par une lecture orientée, veuillent déceler dans cette disposition des relents de tribalisme, une volonté d’exclusion, un obstacle rédhibitoire pour certains concitoyens qui, sans être « autochtones », pourraient nourrir des ambitions de devenir maire locaux particulièrement dans les grandes agglomérations du pays. Au nom de certains principes et valeurs de la République. Cela peut se comprendre. Sauf que s’accrocher aveuglement et sans discernement à des principes trop généraux peut conduire fatalement à une injustice monstrueuse, faisant de certains des « autochtones » partout, tandis que d’autres, à l’inverse, ne pourraient, quoi qu’ils fassent, bénéficier de ce privilège nulle part sur le territoire national.

Au demeurant, des cris exaspérés se font déjà entendre ici et là de la part de certaines communautés devenues irrémédiablement minoritaires au sein de ce qui fut, en d’autres temps, leur terroir. C’est le cas, des Douala de la grande métropole économique des bords du Wouri où l’explosion démographique vertigineuse de ces cinquante dernières années a provoqué de profonds bouleversements. Sans pouvoir gommer cependant les repères anthropologiques qui résistent remarquablement aux assauts du modernisme. Dès lors, i...

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