« Le rôle des médias est essentiel en période de crise et lors des élections »
- Par Alexandra TCHUILEU N.
- 30 déc. 2019 14:42
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Calixte Beyala, écrivaine.
En tant qu’observatrice, quelle évaluation faites-vous de la performance générale des professionnels des médias au Cameroun en 2019 ?
Ma réponse est mitigée... Au Cameroun, on trouve des journalistes qualifiés de très haut niveau dans certains organes de presse- des journalistes qui répondent aux exigences internationales. On perçoit leur professionnalisme à travers leur prisme, leur manière sans concession d’aborder un sujet, de le traiter avec toute l’objectivité requise, nécessaire à l’exercice de ce métier, ce métier noble que d’aucun n’hésite point à qualifier de quatrième pouvoir à juste titre. On les apprécie parce qu’on s’aperçoit en discutant avec eux qu’ils ont une véritable culture générale dans des domaines aussi variées que la politique, la littérature ou encore l’économie… On s’aperçoit qu’ils ont été formatés dans les meilleures écoles dédiées à ce métier, qu’ils respectent un code de déontologie, qu’ils possèdent du savoir-faire et donnent aux citoyens des informations dignes de les éclairer, de les renseigner, de les aider à faire des choix importants dans leur quotidien.
Puis, il y a des journalistes étranges, ceux que je qualifie des journalistes-rumeurs, des journalistes-caniveaux, des journalistes-réseaux sociaux, des journalistes-bas-ventraux, des journalistes-bars-ragots. On se demande bien par quelles écoles ils sont passés et ils sont légion, disqualifiant ce noble métier, lui jetant l’opprobre de telle manière qu’un illettré pourrait les traiter de fous. Ils écument des plateaux de télévision et les studios de radio, débitant des mensonges, des contrevérités, falsifiant la réalité avec une telle facilité qu’on en demeure interloqué. Leur métier n’est pas d’informer mais de désinformer. Leur outrecuidance n’a d’égale que leur désir de faire mal, de dire du mal, de calomnier, de diffamer avec une telle facilité que le pauvre soleil en arrive à douter de sa propre existence, que là-haut dans les cieux, les anges se regardent étonnés, le bon Dieu aussi d’ailleurs... Ces journalistes poubelles-déchets-excréments sont vraiment une plaie béante, une gangrène qui pourrit toute la chair de la société. Ils sont dangereux pour l’équilibre des hommes, pour la paix et ils doivent être combattus avec vigueur.
Le Conseil national de la Communication a dû encore monter au créneau pour rappeler à l’ordre et sanctionner. Mais certains le considèrent comme un chien sans crocs. Quelle appréciation en faites-vous ?
Cet irrespect du Conseil national de la communication correspond à une défiance générale qui aujourd’hui mine la société camerounaise. On y réclame à cors et à cris des changements, mais on y est le premier à ne rien respecter, le premier à désorganiser ce qui se doit d’être organisé, à mépriser ce qui se doit d’être sacralisé, à jeter des peaux de banane partout tout en exigeant la propreté dans les rues et les quartiers. On crie sur Hysacam qui, prétend-on, ne fait pas son boulot, mais on est infoutu capable de balayer sa cour... Cet irrespect participe d’une forme de paresse qui participe de la déchéance générale. On fait semblant de mépriser, de disqualifier toute organisation qui tente de sanctionner parce qu’on manque de colonne vertébrale, de morale, de bon sens, de vision globale, de projection vers un futur glorieux, lumineux. Et on transmet le virus de cette désobéissance civique aux plus jeunes, mettant ainsi toute la structure sociale à mal. Si on n’obéit pas à une institution, on n’obéira pas non plus à sa mère, à son père, à ses aînés, voilà où en est notre beau pays avec ce type de comportement. Le Conseil national de la communication fait son job, à ceux qui enfreignent les règles du journalisme à se réarmer moralement pour obéir à ces injonctions, pour grandir et devenir d’excellents professionnels.
Selon vous, une instance d’autorégulation au sein de la profession serait-elle plus acceptée ?
J’en doute fort, car au Cameroun depuis un certain temps, tout le monde veut commander, tout le monde veut être directeur de ceci, président de cela... Personne ne veut accepter la structure pyramidale si nécessaire au bon fonctionnement de la société et le monde journalistique n’échappe guère à cette réalité. Il suffit de voir les contestations qui accompagnent chaque nomination et le concert de diffamations et d’injures qui s’affalent sur le pauvre promu pour s’en convaincre. Notre société est en perte de repères, peu importe les personnes que vous allez proposer, peu importe le type de structure, c’est notre moi intérieur, notre cartographie mentale qui est mis à mal et qui ne nous permet plus d’appréhender avec quiétude notre monde.
A votre avis, que faut-il faire...
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