L’injustifiable absentéisme


Les deux chambres du parlement viennent de boucler la première session ordinaire de l’année 2022. Les partis politiques représentés dans les deux chambres ont renouvelé leur confiance à leurs membres à diverses fonctions dans les bureaux et les différentes commissions. Pour le cas de la chambre basse du parlement, l’Assemblée nationale, le député du Mayo Sava, Cavaye Yeguié Djibril, a été reconduit au perchoir. Simple formalité pour certains, confiance renouvelée pour sa famille politique, le RDPC. Et depuis lors, tout baigne. Les membres du gouvernement, souvent appelés à rendre compte des différents aspects de la marche de leurs administrations, ont défilé à l’hémicycle dans le cadre des projets de loi à défendre ou à la faveur des questions orales adressées aux ministres par les députés. Seulement, il est arrivé dans certains cas que le gouvernement prêche devant un auditoire dégarni. Dans le cadre du respect de la séparation des pouvoirs, ces hauts commis de l’Etat, ne peuvent pas vraiment se mettre à dos le pouvoir législatif. 
Le 4 avril dernier, la bouche la plus autorisée a donné un coup de pied dans la fourmilière. Le président de l’Assemblée nationale (PAN), avant l’ouverture de la discussion générale sur le projet de loi relatif à la recherche médicale impliquant la personne humaine au Cameroun, est sorti de ses gonds pour dénoncer ses collègues députés qui désertent l’hémicycle. « Chers collègues, venez ! Venez ! Vous êtes élus pour ça, pour venir vous asseoir là. Ils ont dit à leurs électeurs qu’ils allaient à l’Assemblée mais ils ne sont pas là. L’Autre jour, vous étiez 38 ! Vous devriez être au moins 100 ! Quand vous rentrerez dans vos villages, si on vous pose la question de savoir ce qu’on a dit à l’Assemblée nationale et ce que vous-mêmes avez dit, vous ne pourrez pas répondre. ». 
Il n’en fallait pas plus pour que l’opinion s’emballe. A raison peut-être. Car le citoyen lambda n’a pas été habitué à voir le président de l’Assemblée nationale secoué ainsi l’hémicycle. Le PAN est en réalité un bouclier pour les députés et beaucoup de hautes personnalités s’en sont rendues compte. Seulement dans ce cas précis, il se pose un problème d’éthique et de discipline. Le règlement intérieur, qui organise le fonctionnement de l’Assemblée nationale définit dans quel cadre les élus de la nation peuvent bénéficier des permissions d’absence. Des mécanismes de procuration existent et permettent aux députés de s’absenter tout en donnant sa voix à un collègue de son choix pour agir le cas échéant. Une disposition qui donne la latitude de ne pas faire perdre une voix au groupe parlementaire en cas de vote. 
A travers cette tribune, il ne s’agit nullement d’embrigader les députés. Mais ce qui gêne, c’est le très peu de cas que certains parmi ces hommes politiques font de leur mandat. Il est connu de tout le monde que certains élus se retrouvent souvent loin de la capitale politique en pleine session. D’autres, par pudeur, font une apparition, se font élire et trouvent mieux à faire dans leurs couloirs respectifs. On entend d’ici certains qui arguent qu’ils sont souvent à la quête des rencontres avec des membres du gouvernement ou divers autres partenaires pour décrocher tel ou tel projet au profit de leurs électeurs. Initiative louable. Sauf que les cabinets ministériels ne sont pas fermés pendant l’inter-session. Et connaissant le respect que les membres du gouvernement vouent aux élus du peuple, ce prétexte résiste très peu au doute.
Faut-il rappeler, un député est l’élu qui siège à la chambre basse du parlement qu’est l’Assemblée nationale. L’hémicycle n’est donc pas un lieu de villégiature. L’attitude dénoncée par le président de l’Assemblée nationale pose en profondeur un problème de justice sociale. Lorsqu’on connaît la violence des batailles qui accompagnent souvent la sélection des candidats au sein des partis politiques à l’annonce de la tenue des élections législatives, on peut être tenté de suggérer à quelques députés, suffisamment occupés, de laisser la chance à des personnalités plus disponibles, à même de porter les aspirations des populations de la base au sommet et du sommet à la base. On le sait ; une base bien informée sur la marche de la nation sera rarement bernée par les marchands d’illusions et autres affabulateurs. Hormis cet aspect, déserter l’hémicycle en catimini ne rend pas service à une institution souvent présentée par ses détracteurs comme une simple chambre d’enregistrement. Or, il y a bien longtemps que les députés ont ...

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