Il faut repenser la discipline scolaire

Trois cas de violences ont tristement retenu l’attention de la communauté éducative ces dernières semaines. Après s’être empoignée avec sa surveillante générale, une élève a été exclue de son établissement et ce, à quelques mois de l’examen du baccalauréat pour lequel elle est inscrite. Quelques jours après, un autre apprenant a failli mettre fin, à l’aide d’un poignard, à la vie du responsable d’une institution scolaire privée à Yaoundé. Le dernier cas en date est celui d’un jeune élève sur qui une arme blanche a été découverte. Même si les réseaux sociaux constituent, à n’en pas douter, des facteurs amplificateurs de ces scènes de violence qui ont pour cadre les enceintes scolaires, les rixes, les altercations et les propos irrévérencieux rythment désormais les cours de récréation et les salles de classe et sont en train de devenir des faits banals. Dans les cas sus-cités, on a tôt fait de stigmatiser l’élève et d’hystériser la situation. Or, appréhender le problème avec une posture sentencieuse complexifie davantage sa compréhension et n’aide pas à mieux cerner les facteurs qui le produisent.  Il ne faut pas perdre de vue que la violence en milieu scolaire met en cause deux acteurs : l’élève et l’enseignant. Il y a quelques semaines, un enseignant d’une école primaire à Douala a été interpellé pour avoir infligé une horrible bastonnade à son apprenant. Dans la même ville, un autre encadreur a été écroué parce que soupçonné de viols sur ses élèves-filles. 
Les cas de violence qui prennent de l'ampleur ces dernières années dans les milieux scolaires et qui sont abondamment relayés par les médias classiques et les réseaux sociaux, affichent au grand jour les failles dans l'encadrement et l'éducation de nos enfants mais aussi reflètent le caractère violent de l’environnement dans lequel baigne actuellement notre société. L’apprenant et l’enseignant sont les produits de la société. Ils vivent parfois dans leur chair les frustrations et le mal-être de leur environnement et qui constituent des facteurs aggravants de la violence. Le chemin qui mène à l’école n’est pas pavé de roses. Sur la voie publique, dans les marchés et les gares routières, les stades et les lieux de grande concentration humaine, les comportements violents foisonnent. Las de chercher une solution dans le cadre familial ou scolaire, l’enfant développe un comportement agressif parfois dans l’illusion de se protéger ou de se valoriser auprès de ses camarades. Ce phénomène se nourrit par ailleurs du délaissement parental. Dans les zones urbaines difficiles, l’école est une sorte d’éponge, ou tout au moins, elle est poreuse à l’égard de son environnement. Si la plupart des enceintes scolaires fonctionnent dans un cadre clos, elles restent néanmoins connectées à leur environnement immédiat. Les commerces, les débits de boissons, les lieux de loisirs, les structures d’hébergement entretiennent une dangereuse proximité avec les milieux scolaires. C’est ici que sont promus et vendus toutes sortes de produits forts (drogues, alcools, chichia, cannabis, tabac, tramadol) et dont les élèves constituent une « clientèle » de choix. De telles activités riveraines ont eu pour conséquence de produire un affaissement du consensus comportemental et le développement d’une résistance à l’observation de la discipline scolaire.
Les solutions à ce fléau interpellent à la fois la famille, l’institution scolaire et tous les autres acteurs de la chaine éducative. La socialisation de l'enfant incombe d’abord à la famille. Mais aujourd'hui avec les bouleversements qui affectent aussi bien la famille que l'école, on assiste à une sorte de délaissement quant aux responsabilités que chaque institution devrait jouer. Les parents ont toujours été et doivent être les premiers éducateurs de l'enfant. Ils ont le droit et le devoir de mettre en place des mécanismes qui doivent faciliter la transmission des valeurs tant morales, intellectuelles qu'émotionnelles à l'enfant. Or, sous le spécieux argument de contraintes de la vie moderne, beaucoup de parents confient ou abandonnent presque l'éducation de leurs enfants au personnel de ménage, au chauffeur et aux répétiteurs. Les seuls contacts que les enfants gardent avec les parents se nouent au moment de l’expression des besoins d’ordre matériel. Pour certains parents, l’essentiel de la responsabilité consiste à inscrire l’enfant dans un établissement de référence et à attendre de bons résultats scolaires en fin d’année. Or, avec l’avènement des réseaux sociaux qui posent des défis sans précédent au système éducatif, le risque que l’enfant développe une vie en autarcie au sein de sa propre famille devient plus grand. Le fait qu’un enfant se retrouve avec un poignard enfoui dans sa tenue ou ses effets scolaires ou qu’il se retrouve en train de consommer des stupéfiants, témoigne de ce qu’il vit et gère seul ses drames dans sa famille ou dans son école. Or, le suivi de l’enfant par ses parents tant à la maison que dans son établissement permet d’anticiper sur des cas fâcheux tels que survenus récemment dans divers établissements scolaires du pays. Ce suivi passe nécessaire...

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