« Il faut une meilleure mise en commun des ressources »

Dr Christian Pout, ministre plénipotentiaire, président du Think Tank Ceides, Visiting Associate Professor– directeur du séminaire de Géopolitique africaine, Catholic Institute of Paris.

Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine se sont séparés samedi dernier à Malabo en Guinée équatoriale au terme du sommet extraordinaire sur le terrorisme et les changements anticonstitutionnels de régimes en Afrique sans cérémonie de clôture ni communiqué final. Comment expliquer cette première dans l’histoire de l’organisation panafricaine ?
L’ajustement des pratiques protocolaires de l’Union africaine lors de son 16e Sommet extraordinaire portant sur le terrorisme et les changements anticonstitutionnels de régimes en Afrique, tenu à Malabo le 28 mai dernier, est un acte exceptionnel, mais pas étrange, qui peut s’expliquer par la volonté des chefs d’Etat et de gouvernement présents d’amender leur agenda ou les questions à l’ordre du jour, en particulier lorsque les contours d’une décision consensuelle à adopter officiellement n’ont pas encore été définitivement arrêtés. Concernant la non lecture d’un communiqué final lors de ce sommet, je dois dire que même s’il est d’usage qu’elle se fasse à la fin des travaux, il est tout à fait possible de rendre public un communiqué quelques jours après la clôture d’une rencontre officielle. Le plus important n’étant pas le timing, mais plutôt la pertinence du contenu que le communiqué véhiculera. Cette option retenue par les dirigeants et hauts responsables africains ne remet donc pas en cause l’intérêt de ce sommet ou encore, le bien fondé des débats qui ont eu lieu. La Déclaration finale mise en ligne par l’Union africaine est venue rassurer les uns et les autres sur la détermination des chefs d’Etat et de gouvernements à redoubler d’efforts et à rapidement prendre des mesures pour contrer la fièvre terroriste et la flambée des coups d’Etat militaires sur le continent. En effet, cette Déclaration expose avec rigueur les causes et problèmes qui mettent en danger la consolidation de la paix, de la sécurité, et du développement. Tout en présentant la nouvelle feuille de route de l’UA pour endiguer les phénomènes décriés, la Déclaration débouche sur les mesures préventives qui permettront de limiter les dégâts causés par d’autres menaces qui augurent des lendemains plus sombres comme le cyber-terrorisme.  
 
D’aucuns y ont plutôt vu une sorte de malaise qui prévaudrait au sein de l’institution entre dirigeants africains. Les partisans de cette thèse ont-ils totalement tort ? 
Pour ma part, en se basant sur la Déclaration finale de ce sommet, on peut retenir que d’intéressantes pistes de solutions ont été avancées. Le consensus qui semble s’être dégagé témoigne de la vision commune des dirigeants et hauts responsables africains sur les actions collectives à mener pour prévenir et lutter contre le terrorisme, l’extrémisme violent, de même que pour renforcer le respect des principes démocratiques et la bonne gouvernance, voire pour normaliser la situation des pays en proie à l’instabilité sociopolitique. Il demeure cependant vrai que ces dirigeants n’arrivent pas encore à s’accorder totalement sur les stratégies opérationnelles à déployer. La plus-value d’un tel sommet est aussi de donner l’opportunité aux responsables politiques et aux experts de discuter afin de concevoir un plan d’action et de définir les modalités concrètes de sa mise en œuvre. L’urgence des situations et leur sensibilité au regard du fait que la souveraineté de certains Etats peut se trouver ébranlée, imposent nécessairement de s’avancer avec prudence, et de ne pas prendre le risque de faire échouer des initiatives panafricaines louables, à cause des réticences et contestations de quelques Etats membres de l’Union africaine en désaccord avec ses positions. Par ailleurs, la bonne entente des dirigeants africains a pu se manifester dès le 27 mai lors du Sommet extraordinaire de l'Union africaine (UA) sur les crises humanitaires qui a précédé celui sur le terrorisme et les changements anticonstitutionnels des régimes. Les donations et contributions récoltés ont atteint près de 40 milliards de F et permettront de venir en aide à 15 États africains en situation d’urgence humanitaire avec plus de 113 millions de réfugiés et demandeurs d’asile. Il faut dire que l’apport du Cameroun d’un million de dollars a été fort apprécié.

Quelles peuvent donc être les pistes à explorer pour définitivement sortir l’Afrique de cet engrenage ? 
Le continent africain présente en effet un visage peu reluisant, notamment à cause de la progression du terrorisme, de la montée en puissance de l’extrémisme violent et de la radicalisation, mais aussi, du fait de la résurgence des coups d’Etat, pratiques condamnables que l’on croyait disparues. L’interconnexion de ces fléaux et leur transnationalité m’amène à partager l’avis du président de la République, Paul Biya, qui suggéra dans un contexte identique que « les menaces globales fassent l’objet de ripostes toutes aussi globales ». Une meilleure mise en commun des ressources humaines, financières, techniques et informationnelles pa...

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