« Il faudra recourir à des mécanismes alternatifs »

Simon Pierre Omgba Mbida, ministre plénipotentiaire et internationaliste.

Le Premier ministre sortant de la Libye, Abdelhamid Dbeidah, a affirmé dans une récente sortie que 2023 sera une année électorale ? Un tel optimisme est-il permis au regard du contexte actuel ?
On peut réellement douter d’un tel optimisme quand on connait la situation politique extrêmement complexe de la Libye. Ainsi, dans son rapport au Conseil de sécurité des nations unies le 16 décembre dernier sur les activités de la Mission d’appui des Nations unies en Libye (MANUL) dont il est le chef, Abdoulaye Bathily, a déploré que les dirigeants libyens ne soient toujours pas parvenus à surmonter leurs divergences pour résoudre la crise de légitimité des institutions intérimaires.  Or, cette situation crée un risque de division du pays où des signes de partition sont déjà visibles, avec deux gouvernements parallèles, des appareils sécuritaires distincts, une banque centrale divisée, une répartition inégale des revenus pétroliers et gaziers, autant de facteurs qui alimentent, dans toutes les régions du pays, un mécontentement croissant.
Selon lui, le désaccord persistant entre « deux hommes » sur un nombre très limité de dispositions de la base constitutionnelle ne peut plus servir de justification pour prendre en otage tout un pays.  Si la Chambre des représentants et le haut Conseil d’État ne parviennent pas à un accord, il faudra recourir à des mécanismes alternatifs.  Le Conseil de sécurité devrait alors tenir responsables toutes les personnes et entités qui compromettent, directement ou indirectement, la tenue d’élections.  Cela s’applique aux actes commis avant, pendant et après l’élection, a mis en garde le haut fonctionnaire de l’ONU. Le Conseil n’a même pas été en mesure de prendre des sanctions contre les acteurs ayant fait obstruction à celles qui devaient se tenir l’an dernier, alors que ces scrutins auraient permis de dénouer l’impasse dans laquelle se trouvent les institutions nationales, a déploré le représentant libyen, en appelant le Conseil à ne pas répéter les erreurs du passé, et à réfléchir à une sortie de crise. Les rivalités politiques ne peuvent plus servir de justification pour prendre en otage tout un pays.  Il a, dans ce contexte, appelé les membres à réfléchir aux moyens de garantir la tenue d’élections libres, justes et transparentes et à tenir pour responsables les personnes et entités qui ont empêché leur organisation jusqu’à présent.

Le dialogue initié par les Nations unies entre le Conseil suprême de l'État à Tripoli et le Parlement à l’est censé ouvrir le chemin vers ces élections est au point mort, en raison des profondes divergences qui les opposent. Comment sortir de cette impasse ? 
En effet, le pays est paralysé par les tensions entre camps rivaux, incapables de s'entendre sur une loi électorale. La loi électorale est en effet loin de faire l’unanimité dans le pays, au point d'être l'une des principales causes du sempiternel report des élections. Car, le texte, censé déterminer les règles d’un scrutin qui devait être l’aboutissement d’un interminable processus politique parrainé par l’ONU, n'a pas été voté par le Parlement, mais directement ratifié par son chef, Aguila Saleh. Ce dernier est un allié de l’un des principaux candidats, le maréchal Khalifa Haftar qui contrôle de facto l'est et une partie du sud de la Libye. Alors que les désaccords entre les camps rivaux, l’un dans l’Ouest et l’autre dans l’Est, paraissent insurmontables, au point qu’aucun d'entre eux n’était prêt à reconnaître les résultats de la présidentielle, rien ne garantit qu'il y aura une entente rapide autour d’un nouveau calendrier électoral. Tout cela éloigne la perspective d’un retour à la stabilité pour les Libyens.

L’Union africaine et les Nations unies recommandent une réconciliation préalable. Dans quelle mesure cette piste peut-elle prospérer surtout quand on sait que chaque partie campe sur sa position ? 
C’est la raison pour laquelle les A3, à savoir le Gabon, le Kenya et le Ghana, soit les trois membres africains du Conseil de sécurité, saluent le Plan d’action avancé par le représentant spécial, qui se fonde sur de larges consultations avec les parties prenantes libyennes.  Selon les A3 : « Le succès du processus politique dépend de son appropriation et de sa direction par les Libyens eux-mêmes ».   Pour cela, la communauté internationale devrait s’abstenir d’imposer des solutions qui correspondraient à une ingérence étrangère. Les A3 exigent en outre le départ des forces étrangères, des combattants étrangers et des mercenaires qui compromettent l’intégrité territoriale de la Libye et son appropriation nationale du processus de paix.  Pour que les Libyens puissent s’approprier le processus de paix, il faut l...

Reactions

Commentaires

    List is empty.

Laissez un Commentaire

De la meme catégorie