Issa Hayatou : le porte-drapeau

Le ciel de Luanda, la capitale angolaise, est bleu. Quelques heures avant la finale Egypte-Ghana disputée le 31 janvier 2010 et qui a vu les Pharaons l’emporter sur les Black Stars, l’auteur de ces lignes a un échange très bref avec Issa Hayatou au hall de son hôtel. Le président de la CAF venait de raccompagner Sepp Blatter, alors président de la FIFA, venu lui rendre visite. A la fin de la brève entrevue, il me demande quand est-ce que je compte rentrer au Cameroun. Je lui dis : « mercredi ». Il fronce les sourcils et s’interroge pourquoi je passe encore tant de jours en Angola alors que les festivités de la CAN prennent fin. Les Lions indomptables de Paul Le Guen que je suis allé suivre pour le compte de Cameroon Tribune, eux, sont même sortis une semaine plus tôt à Benguela en quarts de finale par l’Egypte. Le président de la CAF me propose sur le champ une place dans l’avion qui va le ramener au Cameroun, le lendemain de la finale de cette 27e édition de la CAN. Le comité local d’organisation -qui avait mis aussi les petits plats dans les grands- avait affrété un aéronef pour le président de la CAF. Apollinaire Ngangué, son directeur de cabinet, l’un de ses confidents-qui l’a précédé dans l’au-delà en 2020 et son autre ami, et non moins collaborateur Abel Mbengue, ancien patron des sports à la CRTV, assistent, en retrait, à la scène. C’est d’ailleurs ce dernier qui assure les diligences de ce voyage retour, en liaison avec les services de la police des frontières et l’équipage. 
Rendez-vous donc le 1er février 2010 à l’aéroport de Luanda. Les choses sont allées vite. Dans la zone VIP, le président Issa Hayatou a les traits tirés. Je me rapproche néanmoins de lui pour dire « bonjour ». Dans le prolongement de la réponse à mon bonjour, il fait rapidement une transition avec les événements de Cabinda. Le 8 janvier, 48h avant le coup d’envoi du tournoi, la CAN avait été endeuillée. Le bus de la délégation togolaise avait été mitraillé au niveau de l’enclave de Cabinda par des sécessionnistes qui revendiquaient l’indépendance de cette province angolaise riche en hydrocarbures. Bilan : deux morts au sein de la délégation togolaise. Le chargé de la « com » et le chauffeur du bus avaient péri dans la fusillade. S’en était alors suivie une grosse polémique, certainement l’une des plus violentes qu’a eue à gérer le cinquième président de la CAF pendant les 28 années qu’il aura passé à la tête de l’instance faîtière du football continental. A l’envoyé spécial de Cameroon Tribune, il avait confié ses états d’âme après cet épisode douloureux. Il pensait qu’il avait subi injustement les critiques.
Une fois donc dans l’avion, pas d’échanges particuliers. Le vol avait été cool, malgré quelques secousses lors de la traversée de Libreville. Après trois heures de vol environ, l’appareil s’était posé sur le tarmac de l’aéroport de Yaoundé-Nsimalen. Nos chemins pouvaient donc se séparer. Le président Hayatou m’avait fait alors gagner 48h. C’est l’une des dernières anecdotes que je garde du prince de Garoua que le Cameroun et Garoua, sa ville natale, ont conduit vendredi dernier à sa dernière demeure au cimetière familial à Laïndé où reposent déjà son père le lamido Hayatou, décédé en 1955, ses frères Sadou Hayatou, ancien Premier Ministre, Alim Hayatou, ancien lamido de Garoua et ancien secrétaire d’Etat à la Santé publique, Ahmadou Hayatou, ancien SG de l’Assemblée nationale et ancien maire de Garoua, entre autres. Issa Hayatou avait 27 sœurs et 19 frères. Il était l’unique enfant chez sa mère. De cette galaxie étoilée bâtie par l’ancien lamido de Garoua, Hayatou, il ne reste plus qu’un homme, Yerima Adamou et deux femmes. 
L’ancien coordonnateur d’Education physique et sportive (EPS) au lycée général Leclerc, était aussi un formateur. L’homme a fait entrer la Coupe d’Afrique des nations dans le cercle très fermé des grandes compétitions de sport. Il a développé avec un rare talent le produit-CAN au point qu’il l’a rendu visible, attractif et crédible. Il a créé des compétitions. Il aimait à dire que le Championnat d’Afrique des Nations (CHAN) et la CAN féminine sont « ses bébés » ! Sous son règne, la CAF est devenue une grosse machine, la CAN un beau label, s’installant comme la quatrième compétition au monde en termes d’audience après les Jeux olympiques, la Coupe du monde de football. Elle est presque au cou...

Reactions

Commentaires

    List is empty.

Laissez un Commentaire

De la meme catégorie