Interview : « Le phénomène a pris une nouvelle dimension »

Pauline Irène Nguene, ministre des Affaires sociales.

Madame le ministre, vous venez de mettre en place un numéro vert permettant de dénoncer la traite des personnes. Quelle est l’ampleur du phénomène aujourd’hui au Cameroun ?
Il convient avant toute chose de rappeler que malgré les diverses abolitions, la traite est un phénomène ancien et constant qui s’est développé à nouveau depuis le début des années 1990 sur tous les continents, n’épargnant aucun pays. Au Cameroun, jusque dans les années 2000, la problématique de la traite des personnes a été principalement centrée sur la traite des enfants à cause de la récurrence des cas de signalement d’enfants victimes dudit fléau. Toutefois, en l’absence de statistiques rigoureusement prélevées sur le terrain pour en évaluer l’ampleur, il est généralement admis que la traite existe dans notre pays sous la forme de servitude dans le cadre du travail domestique et/ou de la prostitution.

Dans ce sens, le Cameroun est souvent présenté comme pays d’origine, de transit ou alors de destination. Il faut enfin noter que ce phénomène a pris une nouvelle dimension il y a peu dans notre pays, avec les cas des jeunes filles victimes de trafic au Moyen Orient et plus récemment, les vagues successives de migrants camerounais rapatriés de Lybie et d’autres pays du Maghreb dont la plupart ont été victimes de trafic et de traite.

Qu’est-ce qui a motivé cette initiative ?
Comme nous l’avons précédemment relevé, il est difficile de disposer de données réelles sur la traite des personnes dans notre pays du fait de l’ignorance des populations qui acceptent et se prêtent souvent aux situations de traite qu’elles confondent volontiers avec ce qui est communément appelé le « confiage » des enfants, du fait également de la peur de dénoncer ou encore du faible accès à la bonne information. Cette situation est de nature à rendre complexes et très peu visibles les actions engagées par le gouvernement et ses partenaires pour prévenir et lutter durablement contre ce fléau.

Par ailleurs, comme vous l’avez sans doute constaté, caractériser la traite des personnes dans notre pays est un exercice difficile en l’absence d’évidences sur le sujet. Il nous a dès lors semblé nécessaire de disposer d’un mécanisme d’alerte et de veille dans le but de pouvoir dénoncer ou signaler les cas, vulgariser la législation en matière de prévention et de répression des actes de trafic et/ou de traite, anticiper l’action de prise en charge des victimes et enfin, faciliter la synergie entre les différents acteurs impliqués dans la chaîne d’intervention par la disponibilité et l’accessibilité aux informations et données statistiques sur le fléau.

Qu’en attendez-vous concrètement ?
Le 1503 n’est pas simplement un numéro pour des appels anonymes. Il se veut d’abord un service d’aide aux victimes et à leurs familles en mettant à leur disposition un espace anonyme pour pouvoir lever le tabou sur les cas de traite. Il constitue également pour ces dernières un Centre Virtuel d’écoute, proche et accessible à moindre frais pour atténuer leur détresse et partager leurs peurs. Nous attendons par ailleurs de la ligne verte qu’elle facilite le référencement des cas aux services compétents les plus proches en fonction de la situation juridique, psychologique, sociale et sanitaire de la victime.

En dehors du numéro vert, quelles sont les actions...

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