« Une coalition d’actions peut être efficace »

Dr Jean Daniel Bombela Bombela, politologue, Université de Yaoundé II-Soa.

Les discours de haine et la xénophobie prennent, ces derniers temps, des proportions alarmantes au sein de notre société, et les pouvoirs publics ont pris une batterie de dispositions pour en venir à bout. Comment appréciez-vous ces actions ?
De prime abord, il faut souligner la dangerosité que ces messages ont, tant pour la cohésion sociale que pour le travail historique et contemporain de construction de notre unité. Ils sapent les efforts collectifs de construction d’un idéal commun de vivre ensemble. Ils sont cependant révélateurs de quelque chose qui semble être ici une fissure ou mieux, une fracture dans notre lien social. Les inégalités d’accès aux ressources, tout comme les options discursives et stratégiques de certains hommes politiques peuvent, à minima, apporter une explication à l’exacerbation de ces discours. A cet égard, les mesures gouvernementales sont salutaires et conservatoires pour le moins. Elles tirent la sonnette d’alarme. Elles nous mettent collectivement face à nos responsabilités. En optant tant pour la répression que pour la sensibilisation et l’éducation du grand public, le gouvernement actionne ses appareils répressifs et idéologiques. Seulement, ces solutions reposent sur une identification relative des coupables. Car il faut le souligner, si ces messages sont audibles et relayés, c’est parce que le problème ne se trouve pas uniquement chez les énonciateurs, mais ailleurs. Et c’est dans cet « ailleurs » qu’il faut avoir le courage de sonder profondément pour accompagner ces solutions.

De nouveaux acteurs non-étatiques (Organisations non-gouvernementales, société civiles, partis politiques, etc.) entrent en scène pour apporter leur contribution à la lutte. Que peuvent concrètement apporter ces acteurs dans ce combat ?
Il ne faut surtout pas manquer de lucidité face à l’action de ces organisations aux agendas multiples. Je pense qu’il faut faire attention à leurs actions. Nous avons des instituons étatiques comme la Commission nationale pour la promotion du bilinguisme et le multiculturalisme qui peuvent voir leur mandat élargi et leurs moyens d’actions et financiers renforcés pour conduire cette lutte. Toutefois, il faut souligner que certaines organisations non gouvernementales et des organisations de la société civile ont développé une expertise en matière de communication sociale et d’accompagnement des politiques gouvernementales. Elles peuvent être objectivement mises à contribution pour cette expertise tout en restant vigilantes. Je crois davantage au rôle des partis politiques dans cette lutte. Ils peuvent, à travers leurs différents communicants et leur travail d’encadrement des militants, insister sur la dénonciation et l’exclusion de leurs partisans qui s’adonnent à la diffusion de ces discours. On peut bien décliner ses ambitions politiques sans fragiliser le tissu social. On peut aussi s’appuyer sur les relais comme les confessions religieuses et les influenceurs du net. Ces derniers ont aujourd’hui une force de pénétration domestique qui permet d’atteindre les foyers et les individus dans leur intimité. Une coalition d’actions reposant sur ces différents acteurs peut être, à mon avis, efficace, surtout s’ils sont aussi mobilisés pour travailler plus sur les causes que sur les conséquences.

Lors d’une conférence de presse le 17 mai dernier, le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, indiquait que l'Etat allait mettre en place, une campagne de sensibilisation et intensifier des actions d'éducation, et autres. Est-ce assez ?
C’est déjà une bonne initiative, si l’on s’attarde principalement sur les conséq...

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