« Il faut saisir les opportunités de la mondialisation décentralisée »

Le Cameroun a abrité la semaine dernière l’Assemblée générale de l’Association internationale des régions francophones. Quel est l’apport d’un tel évènement pour les jeunes régions camerounaises ?
L’Association internationale des régions francophones (AIRF), créée en 2002, constitue l’un des plus grands regroupements des régions-CTD dans le monde et dont la majorité se recrutent en Afrique, en Amérique du Nord (canada) et dans le vieux continent. L’AIRF a pour but de stimuler le développement des territoires francophones en établissant entre les collectivités territoriales régionales des collaborations et échanges d’expériences touchant à leurs domaines de compétences, ainsi que des relations économiques et des partenariats éducatifs et culturels. Vous comprenez donc qu’en militant à un tel regroupement international et en abritant des rencontres s’y rapportant, nos entités infra-étatiques régionales qui n’ont que quelques années d’existence vont en réalité à la rencontre du « recevoir ». Un tel évènement est de nature à permettre aux jeunes régions camerounaises de se faire connaître, d’apprendre et d’accéder à des élixirs de durabilité de la régionalisation. Car, contrairement au mouvement municipal, les dynamiques de régionalisation dans le cadre de la décentralisation territoriale sont très instables, et parfois remises en cause dans le sens de leur rétrécissement, voire dissolution. C’est le cas de l’expérience de la régionalisation au Sénégal et en France par exemples.

Ce rendez-vous est ainsi une ouverture pour elles à l’international. Comment peuvent-elles en tirer profit pour leur développement ?
Justement, ce qui caractérise les dynamiques de décentralisation territoriale c’est la propension à des regroupements à l’échelle nationale, sous-régionale, régionale et mondiale. Ça peut paraitre contradictoire (un oxymore), mais la décentralisation a aussi besoin de ces actions à l’internationale pour « s’émanciper ». Pour avancer, les élus locaux ont besoin de mutualiser leurs expériences, moyens et forces. De ce point de vue, les rencontres internationales des élus locaux et des territoires comme celle qui vient de se dérouler à Yaoundé, deviennent des occasions idoines pour s’ouvrir à la mondialisation décentralisée, qui, à maints égards est positive. Il fallait bien commencer quelque part, et l’AIRF est un bon tremplin, d’autant plus qu’elle tend à prioriser la logique économique de la régionalisation, de la décentralisation, par rapport à la logique politique. Or, justement, dans notre pays, la régionalisation a un objectif de progrès socio-économique, dans un contexte marqué par la transformation structurelle de l’économie à tous les niveaux de gouvernance territoriale (communal, régional et national), telle que prescrite par la stratégie nationale de développement.

Les régions en sont encore à leurs premiers pas et jusqu’à présent il n’y a que très peu de réalisations sur le terrain. Dans ce contexte, quel genre d’initiatives faut-il mettre en avant pour espérer bénéficier d’un appui des partenaires internationaux.
Jusque-là, dans l’ensemble, la décentralisation territoriale dans notre pays suit beaucoup plus une logique politique. Or, dans sa dimension ontologique, la décentralisation est aussi une stratégie économique qui a fait ses preuves dans plusieurs pays, tels que le Danemark ou l’Allemagne. Je pense que c’est à ce niveau économique de l’option décentralisatrice de l’action publique que nos jeunes régions doivent faire la différence, apporter un nouveau souffle. Elles gagneraient donc à privilégier des initiatives allant dans le sens du progrès économique, de l’industrialisation primaire et secondaire, basée sur la valorisation du savoir, du savoir-faire local, ancestral, culturel, la préservation de l’équilibre écologique. Vous comprenez que je veux parler de l’artisanat, de l’encadrement des opérateurs économiques, de la formation professionnelle adaptée aux réalités de chaque région, des PME, de la...