Immigration : non aux solutions mercantiles

Les deux côtés du Sahara ont toujours constitué une plaque tournante d’intenses mobilités et de brassage de populations. Des mouvements migratoires y ont toujours pris pied à travers le commerce transsaharien, la conquête, le pèlerinage et l'éducation religieuse. Des ressortissants des pays subsahariens se rendaient dans le Maghreb pour des travaux saisonniers, et parfois, pour s’y installer. Mais depuis presque trois décennies, la donne a changé : il s’agit d’aller plus loin… en Europe. Le durcissement sans précédent de la politique d’immigration européenne caractérisée par l’octroi sélectif de visas et la création de l’espace Schengen à partir de 1995, ont contribué au développement des filières migratoires clandestines transitant par la Libye, l’Algérie, l’Egypte, la Tunisie et le Maroc. Si la voie aérienne vers la France et la GrandeBretagne s’est progressivement « fermée », de nouvelles voies terrestres (via le désert) et maritimes (via l’Océan atlantique et la mer Méditerranée) se sont ouvertes à destination de l’Italie, du Portugal et de l’Espagne, de la Grèce, transformant les pays du Maghreb en un nouvel espace de transit. Dès lors, l’« immigration choisie » est loin de répondre aux attentes de tous ceux qui veulent partir même au sacrifice de leurs vies. Des centaines de milliers, sinon des millions, de personnes dont un grand nombre de femmes et d’enfants veulent rejoindre le vieux continent ou les Etats-Unis. Ils bravent les affres du désert du Sahara pour atteindre l’Afrique du Nord. S’ils échappent à cette première épreuve de la mort dans les sables du désert, il leur faut encore affronter l’épreuve de la mort dans les profondeurs abyssales de la Méditerranée. L’Océan atlantique, la Méditerranée et le désert sont devenus les cimetières où échouent de milliers d’émigrants africains inconnus qui s’y noient ou périssent en tentant de rejoindre l’Europe. L’immigration clandestine est donc une problématique qui préoccupe tous les Etats africains et européens. Dans une Afrique secouée en permanence par des conflits, subissant de plein fouet les effets du changement climatique et ceux des guerres lointaines comme le conflit RussoUkrainien, un continent dont l’économie est étranglée par la fin de la « success story » des matières premières et des fluctuations du prix du baril, des jeunes en quête d’un mieux-être minimisent les risques d’une aventure à travers le désert et au-dessus de la Méditerranée afin de se retrouver à la « terre promise » qu’est l’Europe avec ses mirages et ses téléréalités. Outre la recherche de protection internationale ou la quête d’opportunités économiques, les pressions familiales poussent plusieurs jeunes à se jeter dans l’aventure. Mais face à ce que l’on pense être un « déferlement » d’Africains sur l’Europe, mal accepté par une partie de l’opinion publique et par les États qui y voient une perte de souveraineté sur la maîtrise de leurs territoires et une menace pour la sécurité et les emplois de leurs citoyens, les Etats membres de l’Union européenne ont dans un premier temps préconisé le durcissement des conditions d’accès sur leur territoire avant de prendre d’autres initiatives de concert avec les pays de transit ou d’origine des migrants à travers l’établissement de partenariats bilatéraux et de diverses formes de dialogue avec les pays d’Afrique du Nord, d’Afrique de l’Ouest, puis du continent africain dans son ensemble. Avant sa désintégration, la Libye était le pays de transit par excellence pour la majorité de migrants en partance pour l’Europe. En février 2017, les dirigeants de l'UE se sont mis d’accord, contre des espèces sonnantes et trébuchantes, sur de nouvelles mesures pour réduire les arrivées irrégulières le long de cette route. Livrée au chaos depuis 2011 et à la guerre civile, le couloir libyen a été presque fermé. Les candidats africains à l’immigration se sont donc rabattus sur la Tunisie. Il y a quelques jours, la présidente de la Commission européenne, la cheffe du gouvernement italien et le Premier ministre néerlandais ont séjourné à Tunis et ont promis 100 millions d’euros (plus de 65 milliards de F) au gouvernement et une aide financière à terme de 900 millions (plus de 590 milliards de F) dans le cadre d’un accord pour « la gestion des frontières, mais aussi pour la recherche, le sauvetage, la lutte contre le trafic et le retour des migrants ». Selon eux, les difficultés économiques que connaît actuellement ce pays vont provoquer des départs massifs de migrants pour le vieux continent. Le Forum tunisien des droits économiques et sociaux, qu...

Reactions

Commentaires

    List is empty.

Laissez un Commentaire

De la meme catégorie