Villes propres : quel visage après le concours ?

Le Cameroun, pays aux atouts incommensurables, moteur de la Cemac, pays riche de sa diversité ethnique et linguistique, ne laisse personne indifférent. Si hier, le pays posait encore, avec un brin d’hésitation, les jalons de son expansion économique après avoir accédé à la souveraineté, aujourd’hui, le triangle national ne peut plus se satisfaire de ses lauriers des années post-indépendance. Tout ou presque a changé. Les photos d’archives des deux principales villes du pays, Yaoundé et Douala, montrent un visage à peine reconnaissable de ces deux capitales. S’il n’y avait pas à cette époque une floraison de gratte-ciel, d’échangeurs ou de luxueux hôtels…, on doit cependant reconnaître une qualité à nos deux villes témoins. Elles étaient propres. Bien tenues en tout cas. Les parkings et autres espaces verts bien en évidence. Mais aussi des habitations bien peintes. Le visiteur d’un musée quelconque aurait aujourd’hui de la peine à croire que nous sommes dans notre pays. Oui, le Cameroun a su opérer une mue. Au fil des ans, elle a même été brutale. A tel enseigne qu’aujourd’hui, tout le monde vit en ville ou alors entre l’arrière pays et les principales agglomérations du pays. Boom démographique, diraient les urbanistes. Toujours est-il que les habitudes d’antan ont été bousculées.
Sans prétention à nous embourber dans la définition de la ville, on peut à la limite emprunter à la délimitation administrative pour avoir notre ville type. Normal dès lors d’exhiber les 14 communautés urbaines et les 360 communes du pays. A partir de cette délimitation administrative, on est au moins sûr que quand on parle de la ville, on peut s’appuyer sur un espace précis pour une appréciation pertinente. Le gouvernement, à travers ses divers démembrements, ne se trompe du reste pas lorsqu’il parle de villes, en s’appuyant sur ses communes pour distinguer les villes qui crèvent l’écran. Seul critère : la propreté. A l’évocation de ce concept, il est fondé, avec le spectacle actuel, de percevoir d’ici, la gêne, les murmures de ceux qui vivent autre chose en ce moment dans les villes camerounaises. Ils ne seront guère suivis dans leur projet de persiflage.
Les arguments ne manquent pas pour adopter une telle posture. Il est juste de rappeler à l’attention collective que la propreté n’est pas un vain mot au Cameroun, un concept nouveau. Mais alors pas du tout puisque déjà, dès les années 1980, voire bien avant, les Camerounais ont su faire corps avec les campagnes nationales d’hygiène et de salubrité. En ces années-là, le censeur a pris l’habitude de faire la ronde, non pas des quartiers de la ville, mais des lointains villages. Les bons villages étaient récompensés et les villages lents à s’approprier la nouvelle donne ont souvent été témoins de la déportation de leurs forces vives vers des cadres plus appropriés à la méditation. Ce voyage était tous frais payés. De retour de ce bref « stage », les récalcitrants étaient les premiers à badigeonner leurs concessions à la chaux vive.
Aujourd’hui, le discours a évolué. On organise l’émulation non plus entre villages, mais entre les villes avec des enveloppes obèses. C’est l’ère du concours des villes propres. Pour la circonstance, les programmes du gouvernement sont mis à contribution, le Feicom et les bailleurs de fonds ne sont pas en reste pour doter nos villes d’infrastructures modernes. Les communes sont donc appréciées à partir de la maintenance de ces équipements. La finalité étant le bien-être des populations. En jetant un regard sur le rétroviseur, on se remémore ces cérémonies de remise de matériel de nettoyage aux associations dans les communes ou encore des opérations coup de poing dirigées par des gouverneurs de région qui se jettent, avec entrain, dans la lutte contre l’insalubrité. Au terme de cette organisation minutieuse, le meilleur maire, mieux la ville la plus propre, reçoit le premier prix. Beaucoup de millions de F en réalité. Cependant, les populations restent dubitatives sur la portée de cette compétition. A raison. Le visage hideux affiché en ce moment par nos villes n’incite guère au triomphalisme. Les tas d’immondices, le piteux état de la voirie urbaine, les interminables bouchons, la négligence dans l&r...

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