« Il n’est pas possible d’exercer le pouvoir sans recourir à la tolérance »

Pr. Falna Taubic, maitre de conférences à la Faculté des arts, lettres et sciences humaines de l’Université de Ngaoundéré, chef de département de sociologie.

La tolérance administrative est régulièrement appliquée par les autorités publiques camerounaises. Qu’est-ce qui, selon vous, peut motiver le recours à cette souplesse dans notre contexte ?
Avant de répondre à votre question, il convient de définir la notion de tolérance administrative qui s’entend comme le fait pour l’administration de s’abstenir volontairement d’utiliser les moyens dont elle dispose pour sanctionner une illégalité commise par un administré ou un citoyen. Si les gouvernants ont toujours eu à recourir à cette inventivité juridico-administrative, il faudrait faire remarquer que son usage a fait florès aux lendemains de la restauration du pluralisme politique. L’objectif étant de maintenir le contrôle sur les leviers du fonctionnement de l’Etat. Le recours à cette technique administrative dans notre contexte peut se justifier par la volonté des gouvernants de ne pas susciter de la part des citoyens un comportement politique de contestations de nature à fragiliser la gestion et l’exercice du pouvoir.

Quelles sont les avantages et inconvénients de cette flexibilité sur la société ?
La flexibilité de l’exercice du pouvoir due à la tolérance administrative participe à la préservation de la paix sociale et de la stabilité politique des Etats. Toutefois, cette tolérance affaiblit en même temps l’autorité de l’Etat en faisant de ce dernier le lit des illégalités dans tous les domaines de la vie publique. Les exemples sont légions en la matière. A titre d’exemple, les systèmes de croyance conventionnels régis par le régime d’autorisation se déploient à un rythme vertigineux. De même, nous assistons aujourd’hui à une recrudescence du désordre urbain. Il est possible pour chaque Camerounais d’apprécier à sa juste valeur les conséquences de la tolérance administrative qui érige les écarts en normes et les normes en écarts.

Après le drame de Mbankolo, le ministre de l’Administration territoriale a dit à plusieurs reprises que la tolérance administrative avait trop duré. Faut-il y mettre un terme définitivement ?
Il n’est pas possible d’exercer le pouvoir sans recourir à la tolérance administrative. La difficulté pour...

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