« Nous visons un contrôle des contenus »

Joseph Chebonkeng Kalabubsu, président du Conseil national de la Communication.

Le CNC organise pendant deux jours le Forum international sur la régulation des réseaux sociaux. La cote d’alerte est visiblement atteinte...
La régulation que nous visons, ce n’est pas pour limiter la liberté d’expression, ni nuire à qui que ce soit. Nous visons une sorte de contrôle au niveau des contenus. Parce que nous avons constaté qu’il y a beaucoup de dérives qui se voient et qui se publient dans les réseaux sociaux. C’est un champ libre où tout le monde a le droit et la liberté de publier. Mais, tout le monde ne connaît pas les conséquences de ce qui est publié. Il s’agit parfois d’appels à la haine, de désinformation, de publications contraires à nos valeurs. Si le Conseil national de la Communication et les autres instances de régulation ne font pas quelque chose pour que cela change, nous risquons d’avoir une société qui va s’embraser. Tout est permis au niveau des réseaux sociaux, puisqu’il n’y a personne pour assurer la veille. Les publications des réseaux sociaux nous ont pris de court. Aucun pays n’était préparé à l’envergure de ce que nous vivons. Ce n’est pas seulement les pays africains qui subissent. Les pays dits développés aussi. Sauf qu’ils ont une population plus éduquée et qui sait faire la discrimination par rapport à ce qu’elle voit et lit sur les réseaux sociaux. C’est l’occasion d’appeler les Camerounais à être plus vigilants et sélectifs par rapport à ces contenus.

La régulation des contenus médiatiques sur des supports traditionnels semble plus aisée. Or, les réseaux sociaux sont virtuels et la contrainte peut s’avérer plus complexe. Quels mécanismes envisagez-vous pour « réguler » ce que font les internautes ?
Le monde est devenu un village planétaire à travers la technologie. Nous voulons saisir cette même opportunité pour essayer, à partir du continent, de voir si nous pouvons influencer les contenus et guider ceux qui ont ces plateformes pour nous aider à bien réguler ces contenus. Ces plateformes ont une vocation commerciale. Plus la plateforme compte d’utilisateurs, plus le marché est grand. De ce fait, ces plateformes veulent faire grandir davantage leur marché. Or, on ne peut pas faire de business si la société est embrasée. C’est pourquoi nous disons aux plateformes qu’autant elles ont une vocation commerciale, autant la paix sociale est importante pour faire grandir le business. Tout ce que nous voulons, c’est sensibiliser ces plateformes sur nos besoins et désirs. Ensuite, les régulateurs se mettent ensemble pour avoir une voix qui porte et attirer l’attention des plateformes sur les effets indésirables de ce que nous voyons sur les réseaux sociaux. Heureusement, elles ont commencé à nous écouter. Nous en avons rencontrées à deux reprises. D’abord à Paris en France, puis à Fès au Maroc. Nous sommes tombés d’accord sur le principe selon lequel ce qui est illégal hors ligne doit l’être aussi en ligne. Maintenant, nous voulons poursuivre les discussions et rapprocher nos points de vue pour arriver à un niveau où on peut avoir un point focal au niveau de chaque régulateur qui peut appeler ces plateformes et attirer leur attention sur certaines publications. Nous avons déjà échangé avec Tik tok qui est d’accord sur ce principe. Tik tok souhaite que nous parvenions à un mémorandum d’entente où le régulateur, qui est une institution crédible dans chaque Etat membre du Réseau des instances africaines de régulation de communication, puisse saisir Tik tok par rapport à un contenu donné. Ce ne sera pas non plus une occasion de tout bannir sur les réseaux sociaux, mais seulement ces publications indésirables.

Ce forum entend faire participer des mastodontes des réseaux sociaux comme Méta, Tik tok et Snapchat. Comment peuvent-ils aider dans ce combat selon vous ?
Nous avons invité certaines de ces plateformes représentées sur le continent. Nous allons discuter ensemble et leur donner l’opportunité de s’exprimer. Nous allons poser nos problèmes sur la table et voir leurs réponses. De plus en plus, elles nous prêtent une oreille plus attentive qu’avant. Ces derniers temps, le marché africain est grandissant. Certaines d’entre elles sont représentées au Nigéria, en Egypte et en Afrique du Sud. Il s’agit de pôles d’attraction. Pour notre sous-région, nous avons un représentant pour toute l’Afrique centrale. Nous avons donc un interlocuteur au niveau de Méta et de Tik tok. Beaucoup ne sont pas représentés sur le continent africain. Commencer à échanger avec ces plateformes est une bonne chose. On peut avoir, non pas la main mise, mais un regard et parfois, un interlocuteur qu’on peut contacter pour limiter certaines publications.

D’autres régulateurs africains sont appelés à prendre part à cette rencontre. Avez-vous pu identifier des expériences d’ailleurs qui pourraient servir à réguler ces contenus au niveau de la sphère virtuelle du Cameroun ?

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