Formalisation du secteur informel : un chantier à achever

Le rapport sur le suivi de l’évolution du secteur informel au Cameroun entre 2005 et 2021 que vient de publier l’Institut national de la statistique (INS) confirme une tendance lourde : ce secteur dominé (à 85,7% en 2021) par les Unités de production inf

 

 
Selon les résultats de la troisième Enquête sur l’emploi et le secteur informel réalisée en 2021 (phase II) par l’INS, le nombre d’UPI est estimé à un peu plus à 3,4 millions sur l’ensemble du territoire national, dont 63,7% en milieu urbain et 36,3% en milieu rural. Comme on pouvait s’y attendre, la majorité d’entre elles (96,4%) n’a pas de numéro de contribuable et ne tient pas une comptabilité formelle au sens du plan comptable Ohada (Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires). Une très faible proportion (3,6%) possède un numéro du contribuable, mais ne tient pas de comptabilité formelle.  
Par ailleurs, pour l’exercice de leurs activités, la plupart des unités concernées (59,8%) ne dispose pas de locaux professionnels et se caractérisent par une grande précarité des conditions d'activité. Moins d’un dixième (9,2%) est pourvu d'un local spécifique (ateliers, boutiques, bureaux, magasins, comptoirs fixes sur les places de marchés) et 31% se trouvent à domicile, généralement sans aucune installation particulière propre à l'activité.
En outre, une proportion très faible dans ce secteur (2,6%) emploie au moins un salarié et la répartition des travailleurs selon le statut montre que les travailleurs pour compte propre (78,3%) sont majoritaires. Le niveau d’instruction le plus fréquent est celui du primaire et concerne plus de trois travailleurs sur dix (31,8%). Quant au revenu moyen mensuel tiré de l’emploi dans le secteur informel, il est de 83 409 F. Pour sa part, le montant total de l’investissement des UPI au cours des douze derniers mois (période sous revue) est évalué à 54 milliards de F. L’importance du secteur informel se mesure également à travers sa masse salariale mensuelle qui est de 25,6 milliards de F. Pour ce qui est des impôts versés, la contribution de ce secteur à l’économie est appréciable. En moyenne, les UPI non agricoles payent mensuellement 5,5 milliards de F d’impôts.
L’autre caractéristique fondamentale des UPI est leur enregistrement marginal auprès de l’administration.  95,7% ne possèdent pas de numéro de contribuable, 97,4% ne sont pas inscrits au registre de commerce, 97,5% ne possèdent pas de carte professionnelle et 99,5% ne sont pas affiliées à la CNPS. Des indicateurs qui, d’après l’INS, présentent pratiquement les mêmes valeurs qu’en 2010. Les résultats révèlent que pour la majorité de ces unités (54,4%), les promoteurs ne sont ni prêts à enregistrer leur entreprise auprès de l’administration, ni prêts à payer les impôts sur leur activité. Ce pourcentage est même en hausse de 8,1 points de pourcentage comparativement à 2010. L’évolution de l’économie informelle est même préoccupante. Selon la Stratégie nationale de développement 2020-2030, la situation de l’emploi au Cameroun est caractérisée par un sous-emploi dont le taux est passé de 70,6% en 2010 à 77,0% en 2014, soit une augmentation de 6,4 points, en décalage avec la trajectoire tracée dans le Document de stratégie pour la croissance et l’emploi (2009-2019) qui visait à le ramener en dessous de 50% à l’horizon 2020. La prolifération du secteur informel représente un des facteurs qui expliquent ce phénomène alors que c’est le secteur formel qui est appelé à être le moteur de la croissance.
Malgré cette situation, le gouvernement ne devrait pas baisser les bras. Autrement dit, il faut poursuivre et achever le vaste chantier de la migration vers le secteur formel. D’autant plus que dans le cadre de la transformation structurelle de l’économie camerounaise, l’État gagne à encadrer ce secteur qui occupe près de 90% des travailleurs. L’enjeu est donc de taille. Au plan fiscal, la canalisation de la plupart de ces acteurs vers les circuits formels permettrait de gagner la bataille de l’élargissement de l’assiette, synonyme d’augmentation des recettes pour financer le développement du pays. Par la même occasion, la qualité de l’emploi s’en trouverait améliorée avec la réduction du sous-emploi et de la précarité des conditions de travail. À terme, il est question de libérer l’énergie créatrice du secteur informel pour augmenter sa contribution à la richesse nationale et créer le plus d’emplois décents et stables.                                                                                                                                                             
Pour y parvenir, l’État doit aller au-delà des ...

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