Interview : « Il faut reconnaître tous ses mérites au président de la République »

Maurice Matanga, Directeur de la Stratégie et du Développement de la SNH, Membre du Comité de Suivi du Comité de Pilotage et de Suivi des pipelines


20 ans après, quelle analyse faites-vous des retombées du pipeline Tchad/Cameroun ?
Un outil d'intégration, un bel exemple de coopération Sud/Sud ; expression de la volonté politique de deux chefs d’Etat, leurs  Excellences Paul Biya du Cameroun et Idriss  Deby du Tchad, de regretté mémoire. Dès l’entame, le Cameroun avait choisi d’aider un pays frère, le Tchad, dans sa quête pour son développement. Selon la vision du chef de l’Etat du Cameroun, S.E. Paul Biya, il s’agissait  d’aider le Tchad à  produire et vendre son pétrole pour son développement. Cette position du Cameroun est demeurée constante. Pris individuellement, nos Etats ne constituent  pas en eux-mêmes  un espace économique à  fort potentiel. Mais réunis, ils offrent plus d’opportunités pour leur  développement  et partant celui de leurs populations.  C'est  justement  pour cela que le président de  la République fait de l’intégration sous régionale, son leitmotiv.
 

Vous voulez dire que le Cameroun était dans une pure démarche philanthropique?
Bien sûr que non. Mais il est important de comprendre les motivations politiques de l’Etat du Cameroun pour comprendre pourquoi le Cameroun a lâché du lest, là où il était en droit d’obtenir plus, en termes de droit de passage. Comme vous le savez, l’essentiel du pipeline Tchad/Cameroun, long de 1070 km au total,  se trouve en terre camerounaise (890km). Notre pays aurait donc pu exiger des droits de transit élevés. C’était du reste la position des experts. Et je peux vous révéler que les discussions furent parfois si âpres, que nous avions, une fois, frôlé la rupture. Mais il faut reconnaître au chef des négociations pour la partie camerounaise, le ministre Adolphe Moudiki, Administrateur Directeur général de la SNH, son doigté, sa perspicacité, son sens élevé de l’Etat et des intérêts de ce dernier ; son sens politique aigu aussi. Il sut calmer les ardeurs de son équipe d’experts ; rappelant que l’Etat du Cameroun n’était pas dans une logique de s’enrichir sur le dos de la République sœur du Tchad. Le droit de transit fut donc arrêté à 0,41 $ US par baril de pétrole transporté. Et, au bout de cinq années d’âpres négociations, au cours desquelles les aspects environnementaux et sociaux ne furent pas en reste, la société en charge de la construction et de l’exploitation du pipeline a été mise sur pied, ouvrant la voie à la construction de l’ouvrage en moins de trois ans ; ...

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