Industrialisation de l’Afrique : l’impératif de compétitivité

Les pays africains engagés sur la voie de l’industrialisation de leurs économies parviendront-ils à mettre sur les marchés du continent et au-delà, des biens de consommation à des prix compétitifs par rapport à ceux de la concurrence occidentale et asiatique ? La question mérite d’être posée après la tenue à Douala, du 19 au 23 août 2024, d’une réunion statutaire du secrétariat technique du Conseil régional de la qualité. Une structure de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) élargie à la RDC et à Sao Tomé & Principe. L’enjeu, pour les pays de l’Afrique centrale, est de mettre sur pied une infrastructure-qualité optimale afin de dynamiser l’économie de la sous-région en la rendant plus diversifiée et plus compétitive, c’est-à-dire, capable de supporter la concurrence implacable du marché. 
Pourquoi s’appesantir sur la qualité des produits et services africains ? Parce que celle-ci est un « outil incontournable pour l’industrialisation, la diversification économique et l’amélioration de la compétitivité des produits du cru en Afrique centrale », et peut permettre « la mise en œuvre adéquate de la stratégie de la Zone de libre échange continentale africaine », lit-on dans la note conceptuelle des assises de la capitale économique. L’idée ici est de souligner le fait que dans l’environnement actuel marqué par une compétition féroce entre les produits locaux, d’Occident et d’Asie, ceux fabriqués dans la sous-région ne pourront s’imposer que s’ils sont meilleurs (bonne qualité) que ceux de la concurrence. Et surtout, s’ils affichent un prix de vente attractif pour convaincre le consommateur qui est et restera le seul arbitre entre les offres en lice. À ce jeu, la partie s’annonce rude pour les économies du continent qui ont mal à leurs productions locales à cause, entre autres, du faible niveau des investissements, du déficit infrastructurel énorme et de la piètre qualité de ce qui existe – ce qui accroît les coûts des facteurs de production et de transaction – des carences dans la gouvernance économique, d’un climat des affaires contraignant, des politiques industrielles qui peinent à être implémentées et d’une main d’œuvre peu qualifiée pour de nombreuses productions industrielles.
Pour être concret, prenons l’exemple édifiant de la situation en cours au Cameroun, locomotive économique de la Cemac, mais qui affiche, d’après l’Institut national de la statistique, un déficit de sa balance commerciale de -2004 milliards de F en 2023, un solde commercial (en pourcentage du Produit intérieur brut) de -11,4% au 4e trimestre 2023 (en glissement annuel), et un Indice des prix à la production industrielle, base 100 en 2016, de -5,4 % en 2023 en glissement annuel. Tout cela se traduit sur le terrain à Douala, le poumon économique du pays, où diverses marchandises provenant de la Chine (deuxième économie mondiale) et d’autres nouveaux pays industrialisés d’Asie, inondent le marché. Au lieudit « Marché chinois » à Akwa, des articles d’habillement (chaussettes, sous-vêtements, chaussures pour femmes et hommes, tissus-pagnes, vêtements prêt-à-porter, casquettes, etc.), des parapluies, des mobiliers en plastique, des ustensiles de cuisine, des articles de décoration, bijoux, téléphones portables avec leurs accessoires et pièces de rechange (pochettes, chargeurs, batteries entre autres), motocyclettes, tricycles (triporteurs), électroménager,  matériel électrique et d’autres articles de quincaillerie sont vendus à des prix abordables. Si bien que l’observateur se pose la question de savoir quels sont leurs coûts de revient dans leurs pays de provenance, pour que ces marchandises soient finalement vendues au Cameroun aux prix qu’on connaît, après prise en compte des frais de transport (maritime, terrestre) et de douane. 
Les consommateurs de ces produits se recrutent essentiellement dans les classes populaires moins nanties. Ces articles sont beaux à vue d’œil. Mais, sont-ils forcément de bonne qualité ? Obéissent-ils aux normes de fabrication camerounaises lorsque celles-ci existent pour les produits concernés ? Il semble que pour le consommateur ordinaire, cet aspect est subsidiaire. L’argument-choc de vente semble être davantage le prix manifestement à la portée du plus grand nombre, dans un contexte où le pouvoir d’achat est faible et la pauvreté prégnante. Dans l’« Introduction au thème : l'Afrique face à la puissance économique de la Chine », « Politique africaine », 2014, n° 134, Antoine Kernen affirme que la ruée vers ces produits s’explique « en raison de leurs prix bas » et que « ces produits chinois s’adressent à une clientèle qui n’avait pas accès à ce type de produits avant leur arrivée ». En somme, conclu-il, « pour nombre de consommateurs africains, c’est l’arrivé...

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