« Il va devoir trouver une équipe pour gouverner »

Dr Simon Pierre Omgba Mbida, ministre plénipotentiaire et internationaliste.

La nomination de Michel Barnier comme Premier ministre en France intervient dans un contexte de fortes tensions et de divisions. Pensez-vous que son arrivée à Matignon décantera la situation actuelle ?
Selon l’article 21 de la Constitution française du 4 octobre 1958, le Premier ministre détermine et conduit la politique de la nation. C’est une prérogative exclusive dévolue aux Premiers ministres français sous la 5e République. Cela signifie donc que le Premier ministre dispose de pouvoirs très importants dans la vie et le fonctionnement de l’Etat en France. C’est pourquoi le choix d’un Premier ministre venant d’une formation politique ultra minoritaire comme Les Républicains (LR) a suscité une levée de boucliers de la gauche française qui accuse le chef de l’État de nier la relative victoire du Nouveau front populaire (NFP) arrivé en tête lors des dernières élections législatives en France. Après une laborieuse recherche d’un profil pour Matignon, la président Emmanuel Macron a arrêté son choix sur un homme engagé depuis 50 ans en politique ayant de ce fait une longue expérience politique pour avoir occupé presque toutes les fonctions.*


Certes Michel Barnier est un homme d’expérience, mais pensez-vous que ce critère suffit pour justifier sa désignation au regard du contexte politique actuel en France ?
Le critère essentiel pour le président de la République était de s’assurer d’une « non-censurabilité » du nouveau locataire de Matignon. La stabilité souhaitée du futur gouvernement a été le critère déterminant dans la décision d'Emmanuel Macron, qui s'apparente à un choix par défaut. Après avoir refusé de nommer la candidate du NFP. De ce point de vue, Michel Barnier cochait plusieurs cases décisives pour le chef de l'État. Il n'a plus d'ambition présidentielle affichée. Il s'avérait donc moins menaçant pour les ambitieux du camp présidentiel. Par ailleurs, il est une figure politique avec une identité à la fois européenne et conservatrice, qui ne devrait braquer ni l'aile gauche du camp présidentiel, ni Les Républicains, ni le Rassemblement national, arbitre assumé d'une nomination penchant à droite. Pourtant ses relations avec le chef de l’État ont souvent été mouvementées. Car en 2021, Michel Barnier n’avait pas hésité à dénoncer la gouvernance du président Macron qu’il qualifiait alors comme « solitaire et arrogante » en déclarant je cite que la France « n’a pas été bien gouvernée. L’échec du président sortant est clair ». Avec sa nomination à Matignon, il semble que les tensions se soient apaisées. Il devra cependant s’inscrire résolument dans une logique de cohabitation pour sortir la France de la situation difficile dans laquelle elle se trouve. Ce sera un défi très difficile à relever tant le pays est divisé et englué dans des considérations idéologiques inconciliables sans une majorité politique claire, stable et fiable à 100%.


Réussira-t-il à mettre sur pied un nouveau gouvernement dans un délai raisonnable surtout quand on sait que sa nomination est intervenue après une longue période d’atermoiement ? 
Compte tenu du contexte difficile et de complexité politique dans lequel il a été nommé, le nouveau Premier ministre va donc devoir trouver une équipe pour gouverner susceptible d'échapper à la censure parlementaire immédiate. Les premières réactions à la nomination de Michel Barnier laissent entrevoir que ce pourrait être un gouvernement de large coalition. Cependant, eu égard à leurs déclarations depuis cette nomination il me semble évident, sauf défection apparentée à une trahison politique et idéologique, qu’il n’y aura personne de la gauche française dans ce gouvernement puisque ce Premier ministre refuse de toucher à certaines questions fondamentales pour eux comme la réforme des retraites par exemple. L'un des enjeux pour Emmanuel Macron était de ne pas voir détricotée sa politique économique afin d'assurer la crédibilité financière de la France et c'est l'une des raisons qui ont poussé le chef de l'État à rejeter l'idée d'un Premier ministre qui appliquerait le programme du Nouveau front populaire. C'est donc avec la droite républicaine qui revient ainsi dans le jeu gouvernemental que le président a fini par trouver un point d'entente. Je pense que dans un délai de deux semaines maximum depuis sa nomination le 5 septembre dernier, il réussira probablement à former un gouvernement dont l’avenir reste néanmoins incertain au regard des exigences de la gauche et de l’extrême droite française sous la conduite du Rassemblement n...

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