« C’est d’abord une lutte pour le changement de mentalités »
- Par Lucien BODO
- 02 oct. 2024 10:57
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Rev. Dr Dieudonné Massi Gams, président de la Commission nationale anti-corruption.
Le Rapport 2023 sur l’état de la lutte contre la corruption au Cameroun révèle un préjudice financier vis-à-vis de l’Etat à hauteur de 114 milliards de F. Soit une hausse de plus de 109 milliards de F par rapport à l’année d’avant. Qu’est-ce qui explique cette forte augmentation ?
L’augmentation enregistrée, qui est exactement de 109 412 503 584 de F, s’explique par trois facteurs : le nombre de dossiers ayant donné lieu à des missions d’enquête de la Conac (16) ; le nombre de décisions rendues par le Conseil de discipline budgétaire et financière (CDBF) et le Tribunal criminel spécial (TCS), soit 43 au total. Nous avons eu à gérer des cas de grande corruption, celle impliquant des forts réseaux et personnalités dans les administrations. Communément appelée « la corruption des tigres », elle met en jeu de gros montants, d’où cette forte augmentation du préjudice financier vis-à-vis de l’Etat.
Cette hausse donne néanmoins l’impression que l’action de la Conac et des autres institutions et administrations ne portent pas les fruits escomptés. Au regard de cela, peut-on vraiment espérer un recul de la corruption chez nous ?
Au contraire, cette hausse est une indication que le travail de la Conac et des autres administrations impliquées dans la lutte contre ce fléau porte des fruits concrets. Le montant de référence est le fruit d’une série d’actions qui commence avec la dénonciation d’un acte de corruption par la population ou par un lanceur d’alerte. Les investigations qui ont suivi ont démontré que la plupart de ces allégations étaient fondées. D’où le préjudice financier causé à l’Etat. Ça nous motive et donne beaucoup d’espoir dans la lutte contre la corruption. La population résiste mieux à ce mal en dénonçant cette mauvaise pratique. Les structures étatiques chargées des investigations font leur travail jusqu’au bout, mettant fin à l’impunité. La peur est graduellement en train de changer de camp et les corrompus et les corrupteurs sont de plus en plus à l’étroit. Cependant, ces préjudices financiers doivent être transformés en ressources financières pour l’Etat à travers des procès criminels rapides et le recouvrement desdits montants.
La Conac et les autres acteurs impliqués ont-ils réellement les coudées franches dans le cadre de cette lutte ?
Oui. Chaque institution joue son rôle selon ses textes de création. Il n’y a pas de chevauchement dans les interventions sur le terrain. Au contraire, nous collaborons pour un meilleur résultat. En effet, nous luttons tous pour un seul objectif : promouvoir le bien-être des Camerounais. D’ailleurs, la qualité et le nombre de contributions contenues dans ce rapport 2023 en disent beaucoup sur l’état de collaboration entre les structures impliquées dans la lutte contre la corruption, ainsi que sur leur indépendance d’action.
Le rapport évoque également des restitutions du corps du délit et des opérations de recouvrement pour plus de 8 milliards de F. Comment renforcer ce dispositif visant à récupérer les fonds perdus ?
La lutte contre la corruption n’a pas pour seul objectif d’envoyer les corrupteurs et corrompus en prison. Au contraire, l’un des objectifs clé de cette lutte est de rendre difficile l’usage des fonds issus de la corruption et d’élever le prix d’un acte de corruption. La montée en puissance des institutions de recouvrement des avoirs issus de la corruption en 2023 nous rassure. Il s’agit particulièrement du Tribunal criminel spécial et de la Société de Recouvrement des créances du C...
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