Eboulements de terrain : la négligence joue contre nous


Dans la nuit du lundi 28 au mardi 29 octobre 2019, un glissement de terrain emportait une dizaine de maisons à Bafoussam au quartier Ngouache, avec un bilan humain d’au moins 42 morts. Un pan d’une colline sur laquelle étaient bâties des habitations précaires avait cédé à la suite de deux journées consécutives de pluies intenses. Dans la foulée, il y avait eu des pleurs, mais aussi des appels à la prise de conscience collective. Pour beaucoup, la persistance de l’homme à vouloir défier un relief hostile à une habitation décente et sécurisée, était une cause non négligeable de ce drame. Mais deux ans après, une autre catastrophe de même nature se produisait dans la même région. En août 2021 à Foumban, au quartier Artisanat, réputé pour son terrain accidenté et ses constructions hors normes, un père et ses deux enfants périssaient dans un éboulement. 
Le dimanche 27 novembre 2022 au quartier Damase à Yaoundé, une autre catastrophe similaire faisait une dizaine de morts. Les victimes prenaient part à une cérémonie funéraire. L’année dernière, c’était au tour des terres boueuses du quartier Mbankolo à Yaoundé d’ensevelir une trentaine de personnes. Un éboulement suite à la rupture d’une digue retenant les eaux d’un lac artificiel situé en amont. Comme si les uns et les autres ignoraient que les effondrements de pans de terrains en saison des pluies surviennent fréquemment à Yaoundé, une ville constellée de collines sur les flancs desquelles des habitations parfois précaires sont construites.
D’emblée, l’on reconnaît avec les experts en la matière que « les catastrophes naturelles sont des phénomènes naturels d’une ampleur et d’une violence exceptionnelles ». Il s’agit par exemple des séismes, éruptions volcaniques, glissements de terrain, coulées de boue, inondations, tsunamis etc. Mais ces évènements soudains et dramatiques sont souvent amplifiés par l’action humaine. Ainsi, dans la subdivision classique des phénomènes naturels, l’on distingue les risques liés à l'action de l'homme (risques anthropiques) et les risques naturels (liés à un aléa naturel). Seulement, à côté des risques naturels de nature géophysique (séismes, éruptions volcaniques…) ou gravitaire, c’est-à-dire purement liés à la pente (éboulements, glissements de terrain, avalanches…), la responsabilité humaine est importante. Ce qui amène certains géographes à relativiser la notion même de risque « naturel ». Ainsi, parmi les risques et catastrophes anthropiques, l’on souligne les spécificités des milieux où s'exerce l'aléa : milieux littoraux, montagnards, milieu urbain, etc.
Ce bref aperçu théorique de géographes et autres urbanistes met en lumière la responsabilité de l’homme dans la préservation ou l’accélération de catastrophes. En effet, un chef de famille qui construit sur une pente abrupte de colline, qui ne peut accéder à son domicile qu’à l’aide d’une échelle, sait pertinemment qu’il est en insécurité. Sur ce tableau, il existe des quartiers où des constructions sont élevées les unes sur les autres.  L’on constate par exemple que lors de la construction des fondations de maisons, les déblaiements sont généralement effectués sans aucune précaution : pas de murs de soutènement pour retenir la terre déblayée. C'est l'érosion anthropique accélérée. Elle livre la terre ameublie aux eaux de ruissellement. A long terme, avec la collecte et l’évacuation de plus en plus abondante des eaux par les toits, des profondes échancrures se creusent entre les maisons. Certaines, en évoluant latéralement, « déchaussent » les murs et provoquent leur écroulement. Ici, la main de l’homme bâtit irrémédiablement la cité du drame. 
Il est donc urgent de renforcer la vigilance et surtout les mesures de répression. Il est surtout indiqué de lutter contre une « pression démographique peu contrôlée ». En effet, comme le démontrent Michel Tchotsoua et Jacques Bonvallot, enseignants chercheurs, dans un article intitulé « Cameroun : processus, causes et stratégies de lutte », nos populations sont « entassées » dans les quartiers construits sans plan. Des zones d’occupation spontanée parfois liée aux considérations ethniques ; chacun préfère construire sa maison dans le quartier de son même s’il doit faire face aux conditions naturelles difficiles. Cette préférence est si forte que certaines personnes investissent deux à quatre fois qu’il ne faudrait pour construire leur maison, car il faut lutter contre l’érosion ou les inondations. Malheureusement, un investissement qui sera englo...

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