Musique : Mory Kante, le griot tradi-moderne

En plus de 40 années de carrière, l’artiste guinéen décédé le 22 mai dernier à 70 ans, a bercé entre africanité et modernisme.

La première partie de cette tragique année 2020 vient d’inscrire dans sa liste nécrologique, un autre grand de la musique africaine. Le Guinéen Mory Kante, baptisé le griot électrique pour sa capacité à mixer les tintements traditionnels de sa Kora avec des sonorités funk et rock, s’est éteint le 22 mai dernier à Conakry. Il s’en allait ainsi, vaincu par une longue maladie, à l’âge de 70 ans. Dans le dictionnaire de la chanson, « Yeke Yeke » est sans doute inscrit en guise de définition près de son nom. Ce tube planétaire a gravé du sceau éternel la réputation de Mory Kante dans la Bible des légendes du continent. Ce digne enfant de l’empire mandingue, en plus de 40 ans de recherche constante, n’a cessé de mettre en valeur l’identité culturelle africaine, par le biais de sa musique. « Yeke Yeke » est le sommet de l’iceberg, car la carrière de l’artiste est une longue histoire.
Né le 29 mars 1950 à Albadaria, un village situé au sud de la Guinée, le petit Mory grandit trempé dans les coutumes ancestrales. Il est le fruit d’une union entre deux personnages forts de la culture mandingue. Fils du célèbre griot guinéen El Hadj Djeli Fodé Kante, et de la cantatrice malienne Fatouma Kamissoko, il est façonné par les techniques les plus intransigeantes de l’art oratoire. Mory est l’un des plus jeunes d’une famille de 38 enfants, mais ses prédispositions artistiques font de lui l’héritier naturel des contes et autres chants traditionnels de sa lignée. Il pagaie entre trois courants : l’école coranique, l’école de la tradition orale et l’école coloniale. A 7 ans, il est envoyé chez sa tante à Bamako. Plus d’une décennie après, en 1968, il fait son entrée à l’Institut des arts de la capitale malienne. Pas longtemps. Son esprit est déjà influencé par toutes ces essences venues des Caraïbes, des Amériques, et d’Afrique. Son adolescence se vit à l’écoute de la rumba congolaise, du rock de Johnny Halliday, de la variété française selon Sylvie Vartan, et surtout de la funk façon James Brown. Il n’a jamais caché s’être abreuvé de toute l’électricité de ces rythmes étrangers. Il a eu le temps de les expérimenter au gré de rencontres enchantées. 
A l’exemple de Tidiane Kone, célèbre saxophoniste du Rail Band de Bamako, qui lui propose d’intégrer l’orchestre. Chose faite, en 1973. Mory, à la voix, y remplacera pendant quelque temps un certain Salif Keita. A Bamako, il s’acoquine également avec le groupe Las Maravillas de Mali, du maestro Boncana Maïga. La chaleur de la salsa le fait frétiller et lui donne envie de conquérir le monde. Mais ce panafricaniste engagé et visionnaire, qui dans les années 80 chantait déjà « Africains unissez-vous, bientôt l’an 2000 », ne peut pas plier bagage sans aller au plus profond de ses origines. D’abord, il veut parfaire son art de la Kora. En 1977, il se met sous les ...

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