« Le retard de la transition réside dans la nature hybride de la coalition »

Dr Ndzana Ntiga Athanase Roland, enseignant de Droit public.

Qu'est-ce qui, selon vous, retarde la transition dans le pays depuis le départ d'Omar el-Béchir ? 
Le Soudan représentait un espoir de démocratisation dans le monde arabe avec la chute d'Omar El Béchir. Après sa destitution par le Conseil militaire de transition qui devient par la suite le Conseil de souveraineté chargé de diriger la transition démocratique du pays ; un conseil composé de militaires et civils apparaissait fragile à cause d'un partenariat paradoxal entre membres de la transition notamment entre civils et militaires, entre révolutionnaires et anciens bourreaux, qui était condamné à échouer. Le coup d'État militaire du 25 octobre 2021 était donc prévisible au vu de la complexité des dynamiques politiques internes du pays pas toujours facile à saisir. Toutefois, le retard de la transition réside dans la nature hybride de la coalition qui repose sur les forces de la liberté et du changement, socle du processus démocratique qui se sont données pour objectif de démanteler l'ancien régime, d'exclure ses partisans du processus politique et de concevoir un régime de transition qui produirait les résultats politiques souhaitables selon eux. Aussi, dans cette lancée, ils ont retardé l'introduction de vraies procédures de transition, telles que la mise en place d'une commission électorale, la rédaction des lois électorales, la prise de mesures pour sauvegarder l'État de droit ou protéger les droits de l'Homme et surtout la liberté d'organisation civile et politique. De plus, l'implication des militaires et des forces de soutien rapide a davantage compliqué la situation.

Il y a eu plusieurs manifestations de rue par des civils demandant le transfert du pouvoir. Pensez-vous que l'armée soit prête pour cela? 
L'armée peine à se retirer malgré l'accord de transition. Il y a deux ans, les militaires s'engageaient à remettre le pouvoir aux civils au Soudan, mais, aujourd'hui encore, ils ont toujours la haute main tandis que les civils peinent à organiser la transition. Et pourtant, les militaires et les civils étaient d'accord pour une transition de trois ans finalement allongée après un accord de paix entre le gouvernement et une coalition de groupes rebelles. L'armée devait partager les pouvoirs régaliens jusqu'à ce qu'un gouvernement civil et un parlement mènent la transition à son terme. L'on peut ainsi noter qu'il y a des relations cordiales entre militaires et civils, mais ils n'ont que rarement travaillé main dans la main et l'armée a gardé tout son pouvoir. Dans cette optique, l'armée traine les pieds provoquant des divisions entre civils en raison de leur absence au pouvoir. Il faut donc remarquer que l'armée voudrait se maintenir, car après 30 ans de régime militaire, il leur est difficile d'abandonner le pouvoir aux civils, d'où ses subterfuges provoquant des divisions dans les rangs des civils.

Quel rôle la communauté internationale doit-elle jouer ? 
L’ONU appelle la communauté internationale à soutenir l'expérience démocratique au Soudan, ceci en faisant tout son possible pour que l'expérience démocratique soit un succès. Et pour cela, la communauté internationale a la stricte obligation de faire tout ce qui est en son pouvoir pour aider à faciliter les conditions du succès de l'expérience démocratique soudanaise actuelle. l'ONU a donc ouvert un bureau des droits de l'Homme à Khartoum qui soutiendra la transition dans quatre domaines : la lutte contre les inégalités et l'autonomisation des femmes ; les réformes juridiques et institu...

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