« Les modérateurs doivent faire le bon casting »

Pr. Jean Nta à Bitang, directeur adjoint de l’Ecole supérieure des sciences et techniques de l’information et de la communication (Esstic), enseignant de journalisme, option presse écrite.

Malgré les multiples interpellations des pouvoirs publics et de la société civile, les débats radiophoniques et télévisés restent l’espace privilégié de certains leaders de partis politiques et d’associations où sont propagés discours de haine, fausses informations, invectives contre les institutions, etc. Pourquoi ?
Dans notre environnement, la télévision et la radio offrent une certaine immédiateté qui fait que la spontanéité avec laquelle les gens s’y expriment, porte plus loin et plus rapidement leur discours. Des discours qui, très souvent souffrent du manque de vérification au préalable. Du coup, si l’on peut questionner les raisons de la prolifération de ce type de programmes, on se rendra compte qu’ils sont faciles à produire, certains médias manquant de moyens. Parce que faciles à réaliser, les débats audiovisuels permettent de meubler aisément le temps d’antenne. Mais le problème se situe parfois au niveau du non-respect des règles. Quelques fois, le journaliste qui doit dicter la conduite à tenir sur le plateau est souvent débordé, dans la mesure où il n’arrive plus à contenir ses invités. D’où le fait que ces derniers tiennent souvent toutes sortes de propos : injurieux, diffamatoires, désinformation, invectives, etc. Ailleurs, quand ce type d’émissions sont organisées, la dimension éthique est mise en avant. On n’insulte pas, on ne tient pas de discours ou de propos inexacts vis-à-vis des personnes ou des personnalités publiques, de manière à les mettre en cause ; surtout quand elles ne sont pas sur le plateau. Etant dans l’impossibilité d’obtenir leur riposte, l’on n’est plus dans un débat dont l’objectif fondamental est la contradiction. Il convient d’observer que ces règles minimales ne sont pas respectées chez nous. C’est une mauvaise liberté de parole. Le modérateur doit, en amont, fixer les règles du jeu, et dire ce qui est permis et ce qui ne l’est pas.


Est-ce donc à dire que les journalistes qui conduisent ces types d’émissions ne sont pas exempts de tout reproche ?
En effet. Une émission audiovisuelle se prépare avant sa retransmission. Compte tenu de ce que le débat est essentiellement contradictoire, on doit choisir ses invités sur la base de leurs compétences, de leurs capacités à enrichir le sujet mis en débat de manière à le faire progresser, afin d’obtenir des conclusions édifiantes. Puisque les débats se déroulent dans les médias, les responsables de ces supports sont les premiers responsables des dérives qui surviennent au cours de la diffusion. C’est la raison pour laquelle la loi a prévu leur interpellation, en cas de dérives. Car ce sont eux qui sont responsables des contenus.


Comment comprendre le fait que certains présentateurs de ces programmes audiovisuels s’entêtent à convier sur leurs plateaux, des intervenants ayant une réputation sulfureuse ?
La raison est souvent simple. On veut faire de l’audience. Ces médias se nourrissent des débordements de certains invités impertinents qui ont du mal à se contenir ou alors à bien se tenir sur un plateau. Cela attire télespecteurs et auditeurs, parce que pour certains d’entre eux, il s’agit d’un spectacle agréable à regarder ou à écouter. Des cas où des intervenants donnent des leçons de journalisme aux modérateurs nous ont souvent été servis ; tout comme des scènes où certains invités s’en prennent à d’autres...

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