« Le fonctionnement d'une économie est intimement lié au niveau d'épargne »

Dr René Yatcho Nyaben, économiste du développement.

La journée mondiale de l’épargne a été commémorée le 31 octobre dernier. Dans un contexte socio-économique de plus en plus difficile, est-il vraiment possible d’épargner au Cameroun ?
Les dispositions à l'épargne dépendent de la faculté des agents économiques à disposer, durant une période déterminée, de revenus non absorbés par la consommation. À ce titre, il est essentiel de souligner que les contraintes conjoncturelles et structurelles actuelles n'incitent pas toujours les agents économiques à allouer leurs ressources de manière à en conserver une part sous une forme ou une autre. En effet, ces derniers temps, les ménages rencontrent des difficultés à épargner en raison de revenus limités qui peinent à couvrir leurs besoins essentiels, ainsi que de l'inflation et des fluctuations des prix qui restreignent leurs capacités de planification financière, compromettant ainsi l'épargne à long terme. De manière analogue, un nombre significatif d'entreprises, confrontées à des difficultés d'accès au financement et à une multiplicité de contraintes opérationnelles (fiscalité, charges salariales, etc.), subissent des situations semblables. De surcroît, l'État n'échappe pas à cette problématique, car ses capacités budgétaires se révèlent souvent restreintes et sa lutte contre la corruption s'avère complexe, ce qui entrave la constitution de réserves susceptibles de permettre une épargne. Il en ressort que le contexte économique actuel n'est guère propice à une dynamique d'épargne. Cependant, en assainissant la conjoncture économique nationale, en favorisant l'éducation financière, en facilitant l'accès aux services financiers, et en promouvant une culture de l'épargne auprès des divers acteurs économiques, il est envisageable d'atteindre des niveaux d'épargne significatifs.


Y a-t-il un ratio à mettre de côté en fonction de ses revenus ?
Il est fondamental de reconnaître qu'aucune mesure universelle ne s'applique de manière uniforme, qu'il s'agisse des ménages, des entreprises ou des États. L'efficacité de ces mesures dépend intrinsèquement des capacités spécifiques de chacun de ces acteurs. À ce titre, divers facteurs interagissent sur les ratios budgétaires, étant donné que les niveaux de dépenses diffèrent considérablement entre les individus, les collectivités et les entreprises. C'est pourquoi la règle largement adoptée du 50/30/20 doit être perçue davantage comme une incitation ou une indication que comme une prescription formelle. Selon cette méthode de budgétisation, largement discutée dans le cadre de l'économie domestique et nationale, le revenu se répartit en proportions définies, à savoir 50% consacrés aux besoins fondamentaux (tels que l'alimentation, le logement, la santé et divers services), 30% pour les dépenses de confort, et 20% pour l'épargne, les investissements et/ou le remboursement des dettes. D'autres approches existent, telles que la constitution de fonds de réserve équivalents à trois ou six mois de dépenses courantes. Ces montants permettent aux ménages de faire face à des situations d'urgence et à des dépenses imprévues. Néanmoins, il convient de noter que toutes ces recommandations ne sont pas systématiquement applicables à tous les contextes ou à toutes les personnes. Elles visent plutôt à établir des lignes directrices pour la gestion des revenus, tant pour les ménages que pour les entreprises et les États, afin de favoriser un équilibre financier en adéquation avec les intérêts et les statuts de chaque acteur.


Quel est l’intérêt économique de l’épargne ?
Le fonctionnement d'une économie est intimement lié au niveau d'épargne, tant individuelle que collective. À l'échelle des ménages, l'épargne constitue une réserve de fonds mobilisables, tant pour faire face à des imprévus que pour réaliser des projets planifiés. En ce sens, elle est perçue comme un pilier de la stabilité financière, offrant une résilience face aux vulnérabilités économiques. Pour les entreprises, l’épargne représente un levier de financement essentiel à l’investissement. C’est à travers ce mécanisme que des ressources financières sont mobilisées pour soutenir leurs activités. Cette dynamique engendre un cercle vertueux, entraînant des effets cumulatifs en matière de prêts et de crédits économiques, susceptibles de propulser la croissance. Au niveau national, un taux d'épargne élevé est synonyme de stabilité économique, car il favorise non seulement une accélération de la croissance, mais également une résilience accrue face aux chocs économiques. Cela s’explique par le fait que des capacités d’autofinancement solides permettent de diminuer l’endettement public, tant interne qu'externe, tout en renforçant le financement de projets d'infrastructure d'envergure tels que les routes, les ponts, les installations industrielles, ou encore les établissements hospitaliers. Les bénéfices de l’épargne ne se limitent pas à ces aspects, car elle joue également un rôle crucial dans d'autres domaines, tels que le soutien &agrav...

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