« La prorogation des mandats des élus est politiquement correcte »
- Par Yvan BOUNOUNG
- 30 déc. 2024 13:52
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Pr. Serge Paulin Akono Evang, enseignant de science politique à l’Université d’Ebolowa.
L’actualité politique du Cameroun a été marquée par un engouement rarement observé autour des inscriptions sur les listes électorales, avec une implication remarquable de certains acteurs, notamment les partis politiques et la société civile. Comment interprétez-vous cette mobilisation ?
De manière routinière, l’année qui précède une année électorale est toujours marquée par de nombreuses logiques et dynamiques sociopolitiques. C’est en ce sens que l’année 2024 qui annoncerait la prochaine élection présidentielle, a donné à voir, entre autres, une mobilisation manifeste des partis politiques et de la société civile pour les inscriptions sur les listes électorales. L’appréhension de cette mobilisation est plurielle. D’abord, il y a les leçons historiques des comportements politiques et électoraux, contradictoires (boycott et boycott du boycott), qui amènent à revoir les arts et manières sociopolitiques de traiter la question des inscriptions sur les listes électorales. Ensuite, la prochaine élection présidentielle, attendue en 2025, est présentée et analysée à tort ou à raison, comme un moment électoral décisif pour le Cameroun et les Camerounais. L’enjeu serait de taille, la rupture et/ou la continuité. Dans l’une des deux hypothèses, il faut mobiliser. En sus, il s’est agi ? pour une partie de l’opposition et de la société civile, incitant parfois à l’incivisme électoral, notamment décourageant les citoyens à s’inscrire sur les listes électorales à travers un discours sur une élection qui serait gagnée d’avance, à faire aujourd’hui bonne presse ou à jouer politiquement responsable aux yeux des Camerounais et de la communauté internationale. Enfin, cette mobilisation autour des inscriptions sur les listes électorales montre que les Camerounais sont de plus en plus politisés, intéressés à la politique et au devenir de la société politique camerounaise. Il faut donc être dans le jeu et non hors-jeu ou hors du jeu politique et électoral.
En 2024 également, les mandats des députés et des conseillers municipaux ont été prorogés. Le gouvernement invoquant des difficultés financières à organiser plusieurs élections la même année. Pour vous, s’agit-il d’un choix réaliste, ou d’un calcul politique comme le soutient une partie de l’opposition ?
A notre humble avis, la prorogation des mandats des députés et des conseillers municipaux est à la fois un choix réaliste et un calcul politique. Il s’agit effectivement d’un choix réaliste dans la mesure où l’organisation des élections qui participe de la consolidation de la démocratie camerounaise a un coût. Des milliards sont dépensés dans l’organisation des différentes élections. C’est donc opportunément et avec raison, qu’au regard de ses multiples et énormes sollicitations financières, le gouvernement, consécutivement à une évaluation réaliste, a pu invoquer les difficultés financières à organiser plusieurs élections la même année. Parce que nous sommes sur le terrain politique, c’est logiquement qu’une partie de l’opposition avance la thèse d’un calcul politique par le parti au pouvoir. Et si tel en est le cas, cela est politiquement normal et compréhensible dans la mesure où, si l’opposition développe ses stratégies pour accéder à la magistrature suprême du pouvoir, le parti au pouvoir en fait autant pour se maintenir ou conserver le pouvoir.
Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, des financeurs ont été arrêtés en Europe et aux Etats-Unis, notamment le nommé Lucas Ayaba Cho. Quelle appréciation faites-vous de la collaboration des Etats où résident les financiers d’actes de terrorisme dans ces deux régions ?
Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, ces arrestations, notamment celle de Lucas Ayaba Cho, amènent à saluer la collaboration de ces Etats. Ceci montre que le Cameroun, à travers le chef de sa diplomatie, le président de la République Paul Biya, jouit d’une crédibilité certaine sur la scène internationale. Les mesures pacifiques de résolution de cette crise prises par les pouvoirs publics camerounais sont appréciées, soutenues et accompagnées par la communauté internationale. Par ailleurs, les terroristes sont progressivement lâchés et affaiblis. Ce qui contribuerait, entre autres, en dépit de quelques résistances, à ramener la confiance et la normalité.
L’une des préoccupations cette année qui s’achève est la persistance de la corruption selon la Conac qui parle d’un préjudice financier de 114 milliards de F au détriment de l’Etat du Cameroun. En plus de ce qui est déjà fait sur le terrain par cette institution et d’autres acteurs, que proposeriez-vous pour que ce fléau soit mieux combattu ?
Le rapport de la Conac montre avec regret que, non seulement la corruption persiste avec un préjudice de plus en plus alarmant, mais aussi les politiques et mesures de prévention et de lutte contre ce fléau doivent être renforcées. A notre humble avis, en plus de ce qui est déjà fait, nous proposons de concilier la dimension spirituelle et la dimension physique pour que la corruption soit mieux combattue. Spirituellement, il faut transformer les mentalités, parce que ce qui se donne amèrement à voir, c’est que plus la corruption est combattue, plus il y a une excitation à la corruption. Les détenteurs du pouvoir religieux ou spirituel doivent amener les fidèles qui sont à la fois gouvernants et gouvernés, à se tourner humblement et sincèrement vers Dieu/Allah, afin de solliciter son pardon et son secours : « Si l’Eternel ne bâtit la maison, ceux qui la bâtissent travaillent en vain ». Temporellement, certaines mesures pourraient être prises : augmenter les salaires pour réduir...
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