« Un impact négatif à éviter »

Pr. Emmanuel Ongo, économiste, enseignant à l’Université de Dschang.

Un acteur politique appelle à des villes mortes à travers la fermeture des commerces et autres boutiques à partir de lundi sur l’ensemble du pays. De manière globale, quels sont les dangers économiques d’une telle démarche ?
Dans le contexte actuel, le gouvernement reste confiant dans la résilience de l’économie camerounaise et dans le sens de responsabilité des acteurs économiques. Le Cameroun dispose aujourd’hui d’un tissu productif diversifié et d’un secteur privé dynamique, capable de maintenir la continuité des activités même face à des appels à la perturbation. Une telle activité peut induire plusieurs dangers potentiels parmi lesquels le ralentissement des activités économiques, la hausse de l’indice des prix à la consommation. On pourrait aussi avoir la baisse des recettes fiscales, un ralentissement de l’investissement, une hausse de l’inflation, et des crédits bancaires. En termes de recettes fiscales et douanières, l’Etat camerounais a prévu en 2025 de collecter près de 4 400 milliards de F de recettes. Un jour de ville morte équivaut à plus de 12 milliards de F pour l’Etat. L’impact sera également plus significatif pour les emplois du secteur informel, qui meublent le tissu économique camerounais.  


Quels effets économiques pourraient subir les commerçants si jamais ils devaient obéir à cet appel ? 
L’impact chez les commerçants sera directement associé à un manque à gagner, que ce soit pour les propriétaires de grands magasins que pour les petits détaillants. Les villes mortes sapent et perturbent les prévisions de recettes pouvant entrainer les manques dans la comptabilité et les retards dans les paiements des factures et des salaires des employés dans les structures commerciales. Pour ceux impliqués dans la vente des produits vivriers, des pertes énormes peuvent été enregistrées, notamment en ce qui concerne les stocks du fait de l’incapacité à les écouler. 
En termes de vente, par exemple, les petits commerçants qui dépendent des flux journaliers de clients, une journée sans recettes représente une perte non négligeable de son revenu mensuel. La perte induit par le respect de cet appel pourrait entraîner un déficit journalier de la recette estimée à 2750 F en milieu urbain et de 1965 F en milieu rural. Cela s’accompagnera également de la détérioration de certains stocks (produits vivriers, périssables), ce qui augmente significativement les pertes. Pour les grands commerçants, les coûts fixes (salaires, loyers, crédits) continueront d’augmenter. Cela pourra créer un effet cumulatif (retards de paiement, perte de confiance des fournisseurs, tension de trésorerie).


Pour les populations de manière générale, comment est-ce qu’une telle démarche pourrait-elle les affecter ?
Spécifiquement, les villes mortes créent une distorsion dans les circuits d’approvisionnement des produits viviers, ce qui se traduit par leur rareté sur le marché et induit une hausse des prix. Ces derniers jours au Cameroun, on a observé, notamment dans les villes comme Douala, des protestations qui ont eu pour effet la hausse du prix de transport passant 200 F pour certains trajets à 500 F pour d’autres, soit une hausse brusque de près de 150%. Ainsi, on pourrait s’attendre à une hausse cumulative des prix des produits viviers de près de 50%. 


Depuis la fin du scrutin,...

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