Interview : « Le non-respect des délais impacte l’exécution physique»

Pr. Isaac Tamba, Directeur général de l’Economie et de la Programmation des investissements publics.

 

Monsieur le Directeur général, la première session du comité national de suivi de l’exécution physico-financière de l’investissement public pour l’année 2024 s’est récemment tenue à Yaoundé. On enregistre une fois de plus de faibles performances. A quoi cela est-il dû réellement ?
D’emblée, votre constat devrait être relativisé, puisque l’exécution physique du budget d’investissement public au 30 septembre 2024 est en hausse par rapport à la même période de l’année 2023. Nous enregistrons en effet une hausse d’environ 4 points en glissement annuel. Mais, il faut reconnaître également que les performances enregistrées sont en deçà de ce que nous escomptions, dans la mesure où l’objectif principal est la maximisation de l’exécution du BIP. Il me plaît d’indiquer que contrairement à l’année dernière, l’exécution physique des projets financés sur ressources externes s’inscrit dans une tendance haussière, de près de huit points en glissement annuel. Ce qui explique la timidité de l’exécution physique actuelle, c’est davantage les performances enregistrées au niveau de l’exécution physique des projets d’investissement sur les ressources internes ordinaires.  En effet, on peut relever un certain nombre de préoccupations. D’abord les retards récurrents observés au niveau de la contractualisation des projets, maillon amont de la chaine d’exécution du BIP, alors que l’exécution physique en elle-même, se situe en aval de ladite chaîne. Il faut dire que le non-respect des délais de contractualisation impacte l’exécution physique. Une simple analyse  entre les marchés programmés, les marchés attribués et signés, et les marchés réceptionnés montre une certaine corrélation entre ces derniers et le taux d’exécution physique. On assiste très souvent à un gap important entre les marchés programmés et les marchés attribués et signés. C’est dire que le problème essentiel réside en amont de la chaine, sans occulter bien entendu, d’autres situations qui se situent dans la chaine de l’exécution financière.

Qu’est-ce que cela induit comme conséquences ?
Cela se traduit par des retards enregistrés sur les délais prescrits par l’autorité des Marchés publics. A titre d’illustration, les procédures de contractualisation doivent être clôturées le 30 avril de chaque année, ce qui n’est pas toujours le cas. Ensuite, le non-respect des procédures de contractualisation par les prestataires génère aussi des retards et par voie de conséquence, des avenants. Un examen attentif des données en notre possession montre que les meilleures performances enregistrées au 30 septembre 2024 émanent des chapitres budgétaires ou alors des régions qui ont un taux de contractualisation supérieur à 50%. On voit bien la relation qui existe entre la contractualisation et l’exécution physique. Maintenant en ce qui concerne l’exécution physique proprement dite, on peut observer quelques difficultés. Plus que les autres exercices budgétaires, la timidité observée cette année relève singulièrement des faibles performances enregistrées au niveau de l’exécution des projets qui bénéficient des ressources internes ordinaires. Plusieurs facteurs expliquent cette situation, dont la faible appropriation par les différents maîtres d’ouvrage des nouvelles procédures, l’appropriation insuffisante des procédures de mobilisation des fonds de contrepartie, la mobilisation partielle et tardive des fonds de contrepartie, parfois au-delà du cycle d’exécution des projets d’investissements publics, la non-prise en compte de la saisonnalité dans l’exécution des projets d’investissements publics par les parties prenantes, etc.  

La sous-consommation du Budget d’investissement public est quand même déplorée depuis plusieurs exercices. Quel est le problème finalement ?
Il ne faut pas être aussi péremptoire. Je dois rappeler que nous avons atteint de 93 voire 95% dans les années 2016-2017. L’exécution du BIP n’est pas une fatalité. Aujourd’hui en raison de contraintes diverses, on note de plus en plus des cas d’abandon de chantiers. Ce qu’on n’observait pas il y a quelques années, et ces abandons sont en général dus en partie au différé observé dans les paiements des prestations. Il s’agit là d’un problème conjoncturel et nous osons croire qu’il sera bientôt  résolu. Une autre difficulté est ce dilettantisme  dans l’exécution des projets qui bénéficient des ressources transférées. Au niveau du ministère en charge des investissements publics, des  missions sont organisées pour sensibiliser, renforcer les capacités, former et informer, pour ramener l’exécution des projets bénéficiant des ressources transférées au niveau de la moyenne nationale. La préférence aux mesures dérogatoires observée ces dernières années dans les CTD notamment, associée à la maturation approximative des projets cause un véritable préjudice à l’exécution efficace des projets. Au moment où je vous parle, des missions du Minepat sillonnent les 374 CTD de notre pays pour les accompagner dans la budgétisation de leurs projets qui b&eac...

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